dimanche 26 février 2012

What Its Really Like… l'espace et le public

… même les alliés Mars Attaque et Aboudjaffar n’ont pas résisté à la tentation. Après quelques hésitations : what it’s really like to work at NASA
Des variantes existent ici et . J’ignore si ce genre de mème circule également du côté du CNES, de l’ESA ou même d’Arianespace. Je laisse le soin au lecteur informé de combler cette lacune...

Pour ma part, cela donne simplement (brève) matière à penser…

Ainsi et pour être plus sérieux, il faut tout d’abord noter qu’en dépit des exploits du siècle dernier et des incontestables progrès scientifiques et technologiques accomplis l’espace reste largement une terra incognita. Selon des études représentatives de la population française, il semble en effet qu’il existe un intérêt certain, mais surtout relatif des individus pour l’espace. Cette tendance n’est certainement pas plus aigue ici en France qu’ailleurs…

... à la différence, c’est notre seconde remarque, que le CNES ne possède pas la même visibilité – j’entends cela, non pas tant au niveau international, que sur le plan domestique  que son équivalent américain toujours très bien positionné dans les enquêtes internationales d’opinion. La chose est aussi valable, multipliée au centuple, pour l’ESA. Bien que largement devancée par la NASA, Arianespace est sans surprise davantage connue et reconnue.

De fait, seulement 51% des Français interrogés disent connaître le CNES (voir ici, p. 6, 2007). C’est certes plus de la moitié. Peut-être devons-nous donc nous réjouir. L’image est d’ailleurs excellente (voir ici, p. 6, 2009) bien que victime elle aussi de la surévaluation de la NASA. Quant à la communication (exception faite d’une application Android qu’on attend toujours), je vous laisse juger


lundi 20 février 2012

Pourquoi aller dans l’espace ? Le cinquantenaire de la « Right Stuff » à la John Glenn

Il y a cinquante ans, le 20 février 1962, neuf mois après le vol de Youri Gagarine, John Glenn devient le premier américain à faire (par trois fois) le tour de la Terre à bord de sa capsule Friendship 7.

La chose peut sembler triviale aujourd’hui. Ne serait-ce que parce que ce vol ne fait qu’imiter, avec beaucoup moins de vigueur, et même quelques frayeurs, les deux précédents succès – Vostok 1 et 2 – soviétiques. John Glenn n’est pas non plus le premier astronaute américain à aller dans l’espace. Il a été devancé par Alan Shepard (1923-1998) à bord de Freedom 7 et par Gus Grissom (1926-1967) à bord de Liberty Bell 7.

Et pourtant, il y a cinquante ans…

… des New-Yorkais sont agglutinés devant la télévision en attente des nouvelles du retour de l’astronaute, les Unes des journaux expriment leur enthousiasme et l’on orchestre à New York la gigantesque « Ticker-Tape Parade », réminiscence de celle offerte à Charles Lindbergh en 1927, et modèle pour celles qui vont ensuite être offertes au héros dans tout le pays. Il n’y a que Shepard pour presque avoir eu droit à autant. Presque.

L’événement relève à l’évidence de l’extraordinaire. Et pour cause, finis les « Flopnik », « Kaputnik », « Oopsnik » et autres « Stayputnik ». Finis aussi les petits « tirs de mortier » au-dessus des Bermudes. Avec John Glenn, les Etats-Unis entrent officiellement dans la course à l’espace.

John Glenn, c’est en effet la fierté retrouvée après le choc humiliant provoqué par le lancement surprise de Spoutnik. Comme l’écrit Tom Wolfe, « John Glenn made us whole again! » Aujourd’hui, l’Amérique se souvient et fête le cinquantième anniversaire du début de l’exploration spatiale habitée made in America
File:John Glenn in his Mercury pressure suit 2.jpg
… mais pas seulement. Car John Glenn est aussi « the last true national hero America has ever had ». Pilote de l’US Marine Corps, originaire d’une petite ville de l’Ohio, Glenn, aujourd’hui âgé de 90 ans, a été choisi en 1959 pour faire parti des « Original Seven », groupe à partir duquel ont émergé les premiers astronautes américains. Sénateur démocrate de 1974 à 1999, il est également devenu en 1998, à l’âge de 77 ans, l’astronaute le plus âgé de l’histoire en effectuant la mission STS-95 à bord de la navette Discovery.
File:JohnGlenn.jpg
Bref, John Glenn c’est la « Right Stuff » à l’état pur.

Ce rapprochement n’est pas nouveau. Le New York Times y fait par exemple référence. Et cela ne doit étonner personne. Outre un best-seller, le livre de Tom Wolfe, écrit en 1979 et traduit dans plusieurs langues (dont le français), a été superbement adapté au cinéma en 1983 par Philip Kaufman avec tout ce que l’époque comptait d’acteurs talentueux (Dennis Quaid, Ed Harris, Scott Glenn, Barbara Hershey, Lance Henriksen, etc.). Mais The Right Stuff est bien plus qu’un succès commercial, un mythe applaudi par certains, une fiction-documentaire peu réaliste critiquée par d’autres, c’est aussi et tout simplement une Thèse – majuscule et italique de rigueur.

Pour quiconque s’intéresse à la conquête de l’espace, non pas tant pour le passionné qui croit en son rêve, que pour l’œil neuf, certes sympathique, mais également critique,  une question revient sans cesse. Mais pourquoi aller dans l’espace ? Or à trop s’intéresser à l’Etat – il est vrai l’acteur majeur, si ce n’est unique, de l’exploration spatiale – le risque est d’oublier la variable humaine. Lire Tom Wolfe, c’est réconcilier ces deux points de vue. Le  personnage central du livre est en effet autant le groupe des « Original Seven » que l’Amérique elle-même. Ainsi, The Right Stuff s’adresse à la fois aux aviateurs qui cherchent à « pushing the outside of the envelope» de leurs appareils et aux Américains « left behind » en lutte avec l’URSS pour la suprématie technologique et morale dans l’espace.

Pourquoi les hommes vont-ils dans l’espace ? Rappelons qu’une fusée n’est après tout qu’un immense bâton de dynamite au sommet duquel s’assoient quelques astronautes. Pire, à la fin des années 1950 et au début des années 1960, « our rockets always blow up ». « Why men were willing – willing? – delighted! – to take on such odds » demande l’auteur ? Là reside l’originalité de la « right stuff ».

Celle-ci n’est pas sans évoquer selon moi l’idée hemingwayienne présente au cœur de En avoir ou pas (To Have and Have Not, 1937). Elle est en effet absolue. L’auteur n’écrit-il pas que « the world was divided into those who had it and those who did not ». On l’a ou on ne l’a pas. « The right stuff », c’est en effet « pousser l’enveloppe », c’est-à-dire non seulement affirmer sa bravoure, son courage et sa virilité au quotidien dans son cockpit, mais aussi posséder les bons réflexes et les capacités réelles qui font la différence entre la vie et la mort au moment opportun, le tout s’intégrant dans quelque chose de plus grand qui dépasse l’individu.

Reste que la « right stuff » est également relative comme le montre l’image de la pyramide – le ziggourat – utilisée par Tom Wolfe. L’auteur utilise d’ailleurs une autre analogie pour expliquer ce qu’est « the right stuff », celle des puritains qui chaque jour se mettent à l’épreuve afin de confirmer l’élection divine (« They were like believing Presbyterians of a century before who used to probe their own experience to see if they were truly among the elect »). Or ce qui fait l’élu fait aussi le damné. Derrière « the right stuff », il y a donc également un sentiment de supériorité opposant le groupe, ses codes et ses valeurs, au reste du monde (« The entire world below… left behind »).

L’entrée de l’humanité dans l’ère spatiale va mettre à rude épreuve cette « right stuff » puisque elle n’implique rien moins qu’un nouveau défi : après les batailles aériennes de la deuxième guerre mondiale et de la guerre de Corée, après les vols dans les nouveaux avions à réaction (Chuck Yeager, Mach 1, puis Mach 2, etc.), vient en effet l’espace : la lutte pour l’ascension au sommet de la pyramide reprend. Devenir un astronaute, tel est le nouveau rêve. Bien sûr, la transition n’est pas aisée et les nouveaux astronautes devront montrer au reste de la confrérie qu’eux aussi ont le contrôle. Ils ne sont pas des « human cannonball », mais des pilotes.

Mais la transition est a posteriori évidente. Avec l’espace, les astronautes accèdent à la « right stuff » la plus pure. C’est en effet ici que s’effectue la convergence entre ce qui est vécu par le pays et ce que les astronautes du programme Mercury vont rapidement incarner par rapport à leurs homologues pilotes restés à bord de leurs avions. Le contexte de la guerre froide change tout, car voilà que l’espace devient le lieu de la compétition virile par excellence. Le mot pourra sembler banal. Il n’en est pas moins révélateur (les astronautes ne sont-ils pas tous des hommes, qui plus est des WASP, brillante incarnation de l’Amérique blanche, rurale et protestante ?). Entre l’URSS et les Etats-Unis, c’est à qui émasculera l’autre, qui sera le premier. The Right Stuff est en réalité une magnifique mise en abyme du duel primitif (combat des dieux), magique (destin, fatum) et antique (Horace contre Curiace) de la guerre froide.

Cette identification ne devient réellement parfaite qu’après le vol orbital de John Glenn. Ce dernier, tout comme ces six autres collègues, était le pionnier de la Nouvelle Frontière, nouvelle version. En 1962, il devient aussi l’éclaireur intrépide. Frienship 7 a montré en effet la voie et a permis aux Etats-Unis de battre l’URSS dans la course à la Lune.

* - *

Peut-être ces quelques mots pourront-ils expliquer l’aura magique qui entoure toujours John Glenn, un être « radioactif » qui a prouvé, tout au long du « test de la foi » qu’a été sa vie, qu’il détenait la « right stuff ». C’est cela que l’Amérique salue aujourd’hui (« John Glenn’s 1962 orbit aboard Friendship 7 », « What John Glenn Saw When He Became the First American to Orbit Earth »). Son parcours inspire (« Glenn's historic orbits still inspire you ») et son héritage, toujours présent (« 50 Years Later, John Glenn's Space Legacy Still Circling Earth »), bien que menacé (« Fifty years after Glenn flight, U.S. buying rides to space », « 50th anniversary of first US space flight is bittersweet »), vaut la peine de se battre pour lui (« John Glenn, 1st American in Orbit, Pushes for Manned Mars Missions », « Glenn, Carpenter Reflect on 50 Years of Americans On-Orbit »). Aussi John Glenn peut-il se permettre quelques remarques sur la politique spatiale actuelle des Etats-Unis (« I am not at all happy with some of the directions the space program is going, in particular retiring the space shuttles before we have a new heavy-lift launching system in place » même s’il comprend avec Obama que « we just don’t have the money »).

Bon anniversaire Friendship 7 !

vendredi 17 février 2012

Photo de la semaine : De la Terre à la Lune, des Etats-Unis à la Chine

Blue Marble - High-Res Image of the Earth

Visionnée pas moins de 3,7 millions de fois dans la galerie Flickr de la NASA, cette image géante à très haute résolution de la Terre, dite « Blue Marble » (Bille Bleue) en souvenir de celle, fameuse, prise par Apollo 17 comme j’en parlais ici, a été prise par le satellite météorologique américain NPP, rebaptisé Suomi NPP et lancé à la fin du mois d'octobre 2011. L’image fait la part belle à l’Amérique du Nord qui se dégage très nettement.

Devant ce succès, l’Agence spatiale américaine a proposé une nouvelle image à haute résolution centrée cette fois-ci sur le continent africain, un assemblage de photographies prises le 23 janvier par le même satellite Suomi NPP lors de six passages successifs. 300 000 personnes ont déjà pu l’apprécier sur Flickr.
VIIRS Africa, with sun glints
Signe du temps, les autres images à avoir fait le tour du net sont chinoises. Il s’agit de photographies à haute résolution prises par la sonde chinoise Chang’e 2, du nom de la déesse de la Lune, lors de son passage au-dessus de la Lune entre octobre 2010 et mai 2011. Chang’e 2 s’est depuis dirigé vers le point de Lagrange L2 du système Terre-Lune situé à 1,5 millions de km de la Terre.

Ce n’est pas la première fois que la Lune est ainsi prise en photo. Certains appareils ont d’ailleurs révélé des images beaucoup plus détaillées de certaines portions de notre satellite. Il n’en reste pas moins que Chang’e 2 a ici constitué la vue la plus précise jamais réalisée de la surface entière de la Lune.



Je ne chercherai pas à pousser l’interprétation trop loin. Une simple mise en perspective suffira. 

Généralement en effet, deux lectures se confrontent lorsque l’on observe les clichés pris depuis l’espace.

Il y a l’espace pour l’espace. Et il y a l’espace pour la Terre. La première vision est exploratoire et conquérante. La seconde est plus protectrice.

De la première on conclut souvent qu’elle incarne la politique spatiale des Etats-Unis, soit la volonté de revenir sur la Lune voire de marcher sur Mars comme démontrée encore récemment. La seconde se rattache à l’espace dit « utile » caractéristique, par exemple, des pays émergents en développement dont (oui !) la Chine.

… avec non pas un mais deux « Back to Earth » pour les Etats-Unis, d’autant plus intéressants qu’obtenus par un satellite de météorologie, plus une poussée chinoise hors de la LEO, que faut-il conclure ?  

* - *

Pour retrouver ces photos de la semaine, il est vrai déjà anciennes, voir pour les Etats-Unis ici et , pour la Chine ici



mercredi 15 février 2012

Peur sur orbite ?

Le numéro de février du magazine Science & Vie publie un article relativement conséquent (8 pages) sur l’espace militaire et intitulé : « Espace : la guerre aura-t-elle lieu ? ».

L’enquête est plutôt bien menée. Le lieu, l’espace, nous est rapidement présenté avec toutes ses spécificités (un bien commun, un espace vital, un espace fragile, la supériorité de l’attaque sur la défense, etc.). De même, les suspects ont été identifiés (Etats-Unis, Russie, Chine, France, etc.) et les principaux témoins appelés à la barre (un casting impressionnant : Theresa Hitchens, Laura Grego et Everett Dolman, etc., pour les Américains ; Christophe Venet de l’IFRI, Henry de Roquefeuil du CNES, Jean-Luc Lefebvre de l’IRSEM, Ph. Coué de chez Dassault, Olivier Fleury de la défense aérienne, Marie-Madeleine Marçais du CESA, Isabelle Sourbès-Verger du CNRS pour les Français).

Reste les armes. Tout comme au Cluedo, il y a l’embarras du choix. De quoi satisfaire tous les goûts et toutes les humeurs : armes atomiques, satellites tueurs, laser, missiles antisatellites et avion spatial multirôle. Cela en deviendrait presque suspect.
Fichier:Starfish Prime aurora from Honolulu 1.jpgspace weapons illustrationFichier:ASAT missile launch.jpgFichier:ABL02.jpgFile:Boeing X-37B inside payload fairing before launch.jpg

Seul hic au tableau, gênant lorsque l’on enquête, la victime ne s’est pas présentée. Le crime n’a en effet pas encore eu lieu. Pire, son occurrence dépend en grande partie de l’idée que l’on se fait sur son inévitabilité ou non. Cet aspect des choses, rapidement traité en conclusion – de manière plus implicite qu’explicite –, mérite certainement notre attention. D’autant plus qu’un intitulé pareil oriente forcément la lecture…

... les développements aujourd’hui à l’oeuvre dans l’espace témoignent dune dimension dautant plus tragique qu’elle est auto-réalisatrice...

lundi 13 février 2012

L’espace, enjeu des élections présidentielles américaines ?

Ce billet a été publié en avant-première sur le site de lAlliance géostratégique.
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Source
L’espace constitue-t-il un enjeu pour les élections présidentielles américaines ? Remarquons d’emblée que ce type de campagne a tendance à focaliser sur les préférences des électeurs concernant quelques problématiques bien définies : l’économie, la guerre en Afghanistan, la santé, etc. Dans ces conditions, nulle attention ou presque ne sera donnée aux enjeux de moindre importance comme peut l’être la politique spatiale. Cela est compréhensible : peu d’électeurs basent leurs décisions sur la position de tel ou tel candidat concernant l’espace. Qui plus est, lorsque les candidats ont une opinion, celle-ci est souvent à peu de choses près la même, y compris entre les partis. Encore que les nominations républicaines de cette année semblent offrir un spectacle bien étrange de ce point de vue.

Le débat républicain…

Il est vrai que cette année un candidat paraît particulièrement inspiré par la nouvelle frontière au point d’ailleurs d’en faire une marque de fabrique. Outre un discours « visionnaire » sur une future base lunaire, Newt Gingrich a explicitement exprimé à plusieurs reprises son désaccord avec l’Agence spatiale américaine qu’il qualifie de bureaucratique. « NASA has become an absolute case study in why bureaucracy can’t innovate » a-t-il ainsi indiqué dans un débat dans le New Hampshire en juin dernier. Si l’argent accordé à la NASA depuis la fin d’Apollo avait été proprement dépensé, alors le pays disposerait aujourd’hui selon lui d’une base lunaire et de plusieurs stations spatiales. « Instead, what we’ve had is bureaucracy after bureaucracy after bureaucracy, and failure after failure ». « I think it is disgraceful the way getting into space has been turned into a political pork-barrel. It’s an abuse of the taxpayer and an abuse of America’s future » a-t-il encore ajouté dans un meeting à Dallas en octobre.

Afin de redynamiser le spatial aux Etats-Unis et inciter le secteur privé à lancer des missions spatiales ambitieuses, y compris vers Mars, Gingrich propose la création de plusieurs grands Prix – équivalant à des milliards de dollars – dans le style des concours organisés au début du XXe siècle alors que l’aviation restait encore une affaire de pionniers. L’exemple classique est le Prix Orteig offert en 1919 par le propriétaire d’hôtels Raymond Orteig au premier aviateur capable de réaliser un vol sans escale au-dessus de l’Atlantique. C’est ce prix qui a conduit Charles Lindbergh à tenter le voyage en 1927 dans le but de gagner les 25 000 dollars de récompense. Des décennies plus tard, on parle d'une industrie pesant 300 milliards de dollars. C’est cette même idée qui a inspiré la X-Prize Foundation de Peter Diamandis. Une approche alternative, mais comparable, est celle sur laquelle se base le programme de Commercial Orbital Transportation Services (COTS) de la NASA.

Le problème est que ce soutien en faveur de l’essor d’un espace commercialisé en lieu et place des grands programmes gouvernementaux d’autrefois revient à endosser la politique de l’homme de la Maison Blanche, celui-là même que les Républicains cherchent à défaire en novembre prochain. En février 2010, dans un op-ed dans le Washington Post, Gingrich n’avait ainsi pas hésité à soutenir la « révolution spatiale » de l’administration Obama, qualifiée de « brave reboot for NASA » méritant « strong approval from Republicans ». Il est vrai qu’Obama coupe ici l’herbe sous le pied de la critique traditionnelle de l’espace par la droite américaine. Difficile dans ces conditions pour les électeurs de trancher, n’y a-t-il pas en effet consensus sur la politique spatiale à adopter ?

… et les positions des candidats : l’espace, comme rhétorique

La campagne de Floride – une étape clé, mais aussi un Etat du « croissant spatial » créé par la NASA et comprenant l’Alabama, le Mississippi, la Louisiane et le Texas – a semblé remettre un peu d’ordre dans cela. De fait, les différents candidats ont bataillé ferme afin de montrer aux électeurs qui tenait la position la plus forte, mais aussi la plus originale et la plus crédible concernant l’espace. Telle est du moins l’impression laissée lors des deux débats télévisés. Les élections de 2012 seront-elles différentes de celles de 2008 ou 2004 ? Verrons-nous l’espace devenir un enjeu ? Nous ne le croyons pas. Nul pouvoir divinatoire ici. Les résultats de Floride – la victoire de Mitt Romney, un ancien gouverneur du Massachussets – en témoignent déjà largement et la campagne qui suit tend à nouveau à le démontrer : la politique spatiale ne pèsera pas lourd face à des problématiques comme la santé de l’économie et le chômage.

Et pourquoi en serait-il autrement ? A s’en souvenir l’intrusion de l’espace dans la campagne, et qui a culminé avec les récentes déclarations de Floride, a elle-même été tout artificielle. Rappelons que c’est en effet Mitt Romney qui, lors d’un débat à Des Moines, Iowa, en décembre dernier, s’est servi de l’espace pour discréditer son adversaire, Newt Gingrich. Lorsque le modérateur lui demandait en quoi ses positions différaient de celle de Gingrich, celui-ci a alors rappelé « his idea to have a lunar colony that would mine minerals from the Moon », une description faite dans un livre écrit en 1984, et de conclure par « I’m not in favor of spending that kind of money to do that ». Ce qui a évidemment déclenché le verbe enflammé de l’ancien président de la Chambre des représentants des Etats-Unis. L’utilisation de l’espace par les divers candidats montre donc en réalité que l’espace ne constitue pas un enjeu en soi, mais peut tout de même servir, ponctuellement, d’argument rhétorique contre tel adversaire, qu’il s’agisse d’un républicain ou de l’homme à abattre, l’actuel occupant de la Maison Blanche.

Pour cette raison, il n’est pas impossible que la politique spatiale réapparaisse ici et là durant la campagne. C’est d’ores et déjà le cas, Gingrich faisant désormais très souvent l’objet d’attaques utilisant l’argument de la base lunaire. Récemment, Rick Santorum – un ancien sénateur de Pennsylvanie – s’est ainsi joint à Mitt Romney pour parler de « fiscal insanity ». Une chose pour laquelle Santorum et Romney ne sont pas forcément appréciés : eux aussi reçoivent leur part de critiques, notamment parce qu’ils sont « cheap », pour reprendre le mot de Gingrich, et qu’ils s’opposent aux conservateurs héritiers de l’esprit visionnaire reaganien. A noter d’ailleurs que les critiques anti-Lune mobilisent un argumentaire que l’on peut qualifier de gauche, à savoir pourquoi aller dans l’espace quand il y a encore tant de besoins sur Terre. Peu importe dans cette perspective d’être dans le vrai ou faux, ce qui importe, ce sont les mots. Ainsi de la critique de la dépendance humiliante des Etats-Unis – une décision datant de l’administration Bush – à l’égard des taxis spatiaux russes en direction de l’ISS. Obama fera certainement les frais dans les semaines à venir de ce genre de commentaires.

Tout cela importe-t-il ? La présidence et l’espace

D’autant plus que Romney, l’actuel favori de la campagne du GOP, aura de plus en plus tendance à directement croiser le fer avec l’administration Obama. « If you wanted to put together a list of President Obama’s failures, it’s a long, long list, indeed. But the one in particular I want to talk about today is his failure to define a mission for the space program for this nation » a-t-il ainsi déjà pu affirmer lors d’un discours en Floride. Dans cette perspective demander si les positions tenues par un candidat lors de la campagne auront une influence en cas de victoire fait-il sens ? A priori, il ne semble pas hardi de croire que l’enthousiasme pour l’espace – même rhétorique – ou, à l’inverse, l’absence d’intérêt, d’un candidat aura un impact sur la politique spatiale des Etats-Unis si jamais celui-ci est élu. Ce serait commettre pourtant deux exagérations.

Tout d’abord, le président n’a pas la mainmise sur la politique spatiale. Cette dernière est de fait à l’intersection de plusieurs logiques, gouvernées par la Présidence certes, mais aussi le Congrès et la bureaucratie. Le président n’est qu’un joueur parmi d’autres. Ensuite, que le président ait un intérêt particulier pour l’espace ou non ne change rien au fait que l’espace – au moins dans sa dimension civile – n’est plus un enjeu national américain depuis la fin des années 1960. L’espace est devenu une activité marginale avec des décisions prises de façon incrémentale, définies sur la base de « ce que l’on peut se permettre » et de « comment on peut le vendre » et impliquant des conflits entre divers groupes. Bref, parfois l’orbite la plus intéressante est située dans la Beltway. Conséquence de cela, ni Reagan, ni Bush père ou Bush fils, n’ont été capables de relancer le programme d’exploration. Reste l’espace militaire. Seul Ron Paul a mis l’accent sur celui-ci durant la campagne, et encore seulement lorsque la question lui a été posée et pour s’opposer à tout « fun » inutile. Si celui-ci est finalement évacué, du moins pour le moment, c’est justement parce qu’il est supposé « utile » et donc incompatible avec la vision de l’espace frontière des pionniers.

Cela n’empêche pas la présidence des Etats-Unis de disposer d’un pouvoir rhétorique très important et de mettre justement à profit cette capacité là dans l’espace, un lieu de prouesses fantastiques rendues possibles autant par les actions physiques (marcher sur la Lune, etc.) que par les mots. En mai 1961, lorsque le président John F. Kennedy révélait ses plans, c’était en disant « Now it is time to take longer strides, time for a great new American Enterprise, time for this Nation to take a clearly leading role in space achievement which in many ways may hold the key to our future on Earth ». Et c’est avec des mots très semblables que le président Ronald Reagan s’exprimait après l’explosion de la navette Challenger en 1986, « We’ve grown used to wonders in this century. It’s hard to dazzle us. But for 25 years the United States space program has been doing just that. We’ve grown used to the idea of space and perhaps we forgot that we’ve only just begun. We’re still pioneers ». De fait, si l’espace sert d’argument rhétorique utile dans la campagne des prochaines semaines, c’est aussi parce que l’espace, par le rôle qu’il joue dans la psyché collective, est le terrain par excellence pour exprimer sa « vision » de l’Amérique. Lorsque Gingrich dit que « I’d like to have an American on the Moon before the Chinese get there », il démontre à la fois sa foi dans l’exceptionnalisme américain et son opposition ferme face au supposé déclin des Etats-Unis.

Les esprits curieux pourront également jeter un œil sur :
Roger D. Launius et Howard E. McCurdy (eds.), Spaceflight and the Myth ofPresidential Leadership, University of Illinois Press, 1997. 
Xavier Pasco, La politique spatiale des Etats-Unis 1958-1995, L’Harmattan, 1997.

mercredi 8 février 2012

Pourquoi partir à la conquête de l’espace ?

File:NASA-Apollo8-Dec24-Earthrise.jpg
Roger Launius, historien, fin connaisseur de la chose spatiale – notamment américaine – et auteur de très nombreux ouvrages, est aussi bloggeur à ses heures perdues. Or voilà qu’il vient de reproduire sur son blog une très belle lettre rédigée en 1970 par Ernst Stuhlinger, alors Associate Director for Science au Marshall Space Flight Center, à Huntsville, Alabama, en réponse à Sœur Mary qui, s’occupant des enfants affamés de Zambie en Afrique, s’interroge avec naturel et sincérité sur le caractère raisonnable (i.e. utile) de la conquête de l’espace. Je reproduis la lettre telle quelle. Elle reste, près de quarante après, un témoignage éloquent en faveur de l’exploration de l’espace.

Qu’on me permette toutefois une mise en contexte. Tout d’abord, un des principaux débats agitant la communauté spatiale depuis les origines concerne effectivement l’intérêt économique qu’il y a à aller dans l’espace. Pour certains, les vols spatiaux – notamment habités – gaspillent l’argent dont l’utilisation serait la bienvenue dans d’autres secteurs « terrestres » (faim dans le monde, environnement, éducation, programmes sociaux, etc.). Pour d’autres, les bénéfices liés aux activités spatiales (emplois et retombées technologiques) sont au contraire cruciaux.

Bien entendu, les justifications sont à la fois plus nombreuses et plus profondes. J’ai moi-même essayé ici, ici, ici et d’en faire la présentation grossière. Je me promets d’ailleurs d’y revenir. N’en demeure pas moins que, de ce point de vue, le principal mérite d’Ernst Stuhlinger est de dépasser cette opposition binaire classique. A noter que Stuhlinger, né en Allemagne en 1913, a fait partie des 127 scientifiques qui, à la fin de la Deuxième guerre mondiale, ont décidé, avec Wernher von Braun (1912-1977), d’immigrer aux Etats-Unis. Il y est mort en 2008 à l’âge de 94 ans.
Dear Sister Mary Jucunda,
Your letter was one of many which are reaching me every day, but it has touched me more deeply than all the others because it came so much from the depths of a searching mind and a compassionate heart. I will try to answer your question as best as I possibly can.
First, however, I would like to express my great admiration for you, and for all your many brave sisters, because you are dedicating your lives to the noblest cause of man: help for his fellowmen who are in need.
You asked in your letter how I could suggest the expenditures of billions of dollars for a voyage to Mars, at a time when many children on this Earth are starving to death. I know that you do not expect an answer such as “Oh, I did not know that there are children dying from hunger, but from now on I will desist from any kind of space research until mankind has solved that problem!” In fact, I have known of famined children long before I knew that a voyage to the planet Mars is technically feasible. However, I believe, like many of my friends, that travelling to the Moon and eventually to Mars and to other planets is a venture which we should undertake now, and I even believe that this project, in the long run, will contribute more to the solution of these grave problems we are facing here on Earth than many other potential projects of help which are debated and discussed year after year, and which are so extremely slow in yielding tangible results.
Before trying to describe in more detail how our space program is contributing to the solution of our Earthly problems, I would like to relate briefly a supposedly true story, which may help support the argument. About 400 years ago, there lived a count in a small town in Germany. He was one of the benign counts, and he gave a large part of his income to the poor in his town. This was much appreciated, because poverty was abundant during medieval times, and there were epidemics of the plague which ravaged the country frequently. One day, the count met a strange man. He had a workbench and little laboratory in his house, and he labored hard during the daytime so that he could afford a few hours every evening to work in his laboratory. He ground small lenses from pieces of glass; he mounted the lenses in tubes, and he used these gadgets to look at very small objects. The count was particularly fascinated by the tiny creatures that could be observed with the strong magnification, and which he had never seen before. He invited the man to move with his laboratory to the castle, to become a member of the count’s household, and to devote henceforth all his time to the development and perfection of his optical gadgets as a special employee of the count.
The townspeople, however, became angry when they realized that the count was wasting his money, as they thought, on a stunt without purpose. “We are suffering from this plague,” they said, “while he is paying that man for a useless hobby!” But the count remained firm. “I give you as much as I can afford,” he said, “but I will also support this man and his work, because I know that someday something will come out of it!”
Indeed, something very good came out of this work, and also out of similar work done by others at other places: the microscope. It is well known that the microscope has contributed more than any other invention to the progress of medicine, and that the elimination of the plague and many other contagious diseases from most parts of the world is largely a result of studies which the microscope made possible.
The count, by retaining some of his spending money for research and discovery, contributed far more to the relief of human suffering than he could have contributed by giving all he could possibly spare to his plague-ridden community.
The situation which we are facing today is similar in many respects. The President of the United States is spending about 200 billion dollars in his yearly budget. This money goes to health, education, welfare, urban renewal, highways, transportation, foreign aid, defense, conservation, science, agriculture and many installations inside and outside the country. About 1.6 percent of this national budget was allocated to space exploration this year. The space program includes Project Apollo, and many other smaller projects in space physics, space astronomy, space biology, planetary projects, Earth resources projects, and space engineering. To make this expenditure for the space program possible, the average American taxpayer with 10,000 dollars income per year is paying about 30 tax dollars for space. The rest of his income, 9,970 dollars, remains for his subsistence, his recreation, his savings, his other taxes, and all his other expenditures.
You will probably ask now: “Why don’t you take 5 or 3 or 1 dollar out of the 30 space dollars which the average American taxpayer is paying, and send these dollars to the hungry children?” To answer this question, I have to explain briefly how the economy of this country works. The situation is very similar in other countries. The government consists of a number of departments (Interior, Justice, Health, Education and Welfare, Transportation, Defense, and others) and the bureaus (National Science Foundation, National Aeronautics and Space Administration, and others). All of them prepare their yearly budgets according to their assigned missions, and each of them must defend its budget against extremely severe screening by congressional committees, and against heavy pressure for economy from the Bureau of the Budget and the President. When the funds are finally appropriated by Congress, they can be spent only for the line items specified and approved in the budget.
The budget of the National Aeronautics and Space Administration, naturally, can contain only items directly related to aeronautics and space. If this budget were not approved by Congress, the funds proposed for it would not be available for something else; they would simply not be levied from the taxpayer, unless one of the other budgets had obtained approval for a specific increase which would then absorb the funds not spent for space. You realize from this brief discourse that support for hungry children, or rather a support in addition to what the United States is already contributing to this very worthy cause in the form of foreign aid, can be obtained only if the appropriate department submits a budget line item for this purpose, and if this line item is then approved by Congress.
You may ask now whether I personally would be in favor of such a move by our government. My answer is an emphatic yes. Indeed, I would not mind at all if my annual taxes were increased by a number of dollars for the purpose of feeding hungry children, wherever they may live.
I know that all of my friends feel the same way. However, we could not bring such a program to life merely by desisting from making plans for voyages to Mars. On the contrary, I even believe that by working for the space program I can make some contribution to the relief and eventual solution of such grave problems as poverty and hunger on Earth. Basic to the hunger problem are two functions: the production of food and the distribution of food. Food production by agriculture, cattle ranching, ocean fishing and other large-scale operations is efficient in some parts of the world, but drastically deficient in many others. For example, large areas of land could be utilized far better if efficient methods of watershed control, fertilizer use, weather forecasting, fertility assessment, plantation programming, field selection, planting habits, timing of cultivation, crop survey and harvest planning were applied.
The best tool for the improvement of all these functions, undoubtedly, is the artificial Earth satellite. Circling the globe at a high altitude, it can screen wide areas of land within a short time; it can observe and measure a large variety of factors indicating the status and condition of crops, soil, droughts, rainfall, snow cover, etc., and it can radio this information to ground stations for appropriate use. It has been estimated that even a modest system of Earth satellites equipped with Earth resources, sensors, working within a program for worldwide agricultural improvements, will increase the yearly crops by an equivalent of many billions of dollars.
The distribution of the food to the needy is a completely different problem. The question is not so much one of shipping volume, it is one of international cooperation. The ruler of a small nation may feel very uneasy about the prospect of having large quantities of food shipped into his country by a large nation, simply because he fears that along with the food there may also be an import of influence and foreign power. Efficient relief from hunger, I am afraid, will not come before the boundaries between nations have become less divisive than they are today. I do not believe that space flight will accomplish this miracle over night. However, the space program is certainly among the most promising and powerful agents working in this direction.
Let me only remind you of the recent near-tragedy of Apollo 13. When the time of the crucial reentry of the astronauts approached, the Soviet Union discontinued all Russian radio transmissions in the frequency bands used by the Apollo Project in order to avoid any possible interference, and Russian ships stationed themselves in the Pacific and the Atlantic Oceans in case an emergency rescue would become necessary. Had the astronaut capsule touched down near a Russian ship, the Russians would undoubtedly have expended as much care and effort in their rescue as if Russian cosmonauts had returned from a space trip. If Russian space travelers should ever be in a similar emergency situation, Americans would do the same without any doubt.
Higher food production through survey and assessment from orbit, and better food distribution through improved international relations, are only two examples of how profoundly the space program will impact life on Earth. I would like to quote two other examples: stimulation of technological development, and generation of scientific knowledge.
The requirements for high precision and for extreme reliability which must be imposed upon the components of a moon-travelling spacecraft are entirely unprecedented in the history of engineering. The development of systems which meet these severe requirements has provided us a unique opportunity to find new material and methods, to invent better technical systems, to manufacturing procedures, to lengthen the lifetimes of instruments, and even to discover new laws of nature.
All this newly acquired technical knowledge is also available for application to Earth-bound technologies. Every year, about a thousand technical innovations generated in the space program find their ways into our Earthly technology where they lead to better kitchen appliances and farm equipment, better sewing machines and radios, better ships and airplanes, better weather forecasting and storm warning, better communications, better medical instruments, better utensils and tools for everyday life. Presumably, you will ask now why we must develop first a life support system for our moon-travelling astronauts, before we can build a remote-reading sensor system for heart patients. The answer is simple: significant progress in the solutions of technical problems is frequently made not by a direct approach, but by first setting a goal of high challenge which offers a strong motivation for innovative work, which fires the imagination and spurs men to expend their best efforts, and which acts as a catalyst by including chains of other reactions.
Spaceflight without any doubt is playing exactly this role. The voyage to Mars will certainly not be a direct source of food for the hungry. However, it will lead to so many new technologies and capabilities that the spin-offs from this project alone will be worth many times the cost of its implementation.
Besides the need for new technologies, there is a continuing great need for new basic knowledge in the sciences if we wish to improve the conditions of human life on Earth. We need more knowledge in physics and chemistry, in biology and physiology, and very particularly in medicine to cope with all these problems which threaten man’s life: hunger, disease, contamination of food and water, pollution of the environment.
We need more young men and women who choose science as a career and we need better support for those scientists who have the talent and the determination to engage in fruitful research work. Challenging research objectives must be available, and sufficient support for research projects must be provided. Again, the space program with its wonderful opportunities to engage in truly magnificent research studies of moons and planets, of physics and astronomy, of biology and medicine is an almost ideal catalyst which induces the reaction between the motivation for scientific work, opportunities to observe exciting phenomena of nature, and material support needed to carry out the research effort.
Among all the activities which are directed, controlled, and funded by the American government, the space program is certainly the most visible and probably the most debated activity, although it consumes only 1.6 percent of the total national budget, and 3 per mille (less than one-third of 1 percent) of the gross national product. As a stimulant and catalyst for the development of new technologies, and for research in the basic sciences, it is unparalleled by any other activity. In this respect, we may even say that the space program is taking over a function which for three or four thousand years has been the sad prerogative of wars.
How much human suffering can be avoided if nations, instead of competing with their bomb-dropping fleets of airplanes and rockets, compete with their moon-travelling space ships! This competition is full of promise for brilliant victories, but it leaves no room for the bitter fate of the vanquished, which breeds nothing but revenge and new wars.
Although our space program seems to lead us away from our Earth and out toward the moon, the sun, the planets, and the stars, I believe that none of these celestial objects will find as much attention and study by space scientists as our Earth. It will become a better Earth, not only because of all the new technological and scientific knowledge which we will apply to the betterment of life, but also because we are developing a far deeper appreciation of our Earth, of life, and of man.
The photograph [voir ci-dessus, et également ici] which I enclose with this letter shows a view of our Earth as seen from Apollo 8 when it orbited the moon at Christmas, 1968. Of all the many wonderful results of the space program so far, this picture may be the most important one. It opened our eyes to the fact that our Earth is a beautiful and most precious island in an unlimited void, and that there is no other place for us to live but the thin surface layer of our planet, bordered by the bleak nothingness of space. Never before did so many people recognize how limited our Earth really is, and how perilous it would be to tamper with its ecological balance. Ever since this picture was first published, voices have become louder and louder warning of the grave problems that confront man in our times: pollution, hunger, poverty, urban living, food production, water control, overpopulation. It is certainly not by accident that we begin to see the tremendous tasks waiting for us at a time when the young space age has provided us the first good look at our own planet.
Very fortunately though, the space age not only holds out a mirror in which we can see ourselves, it also provides us with the technologies, the challenge, the motivation, and even with the optimism to attack these tasks with confidence. What we learn in our space program, I believe, is fully supporting what Albert Schweitzer had in mind when he said: “I am looking at the future with concern, but with good hope.”
My very best wishes will always be with you, and with your children.
Very sincerely yours,
Ernst Stuhlinger
Associate Director for Science

dimanche 5 février 2012

« Au-delà de la Syrie, le Grand Jeu »

Voilà un café stratégique qui vient à point nommé. Réservez dès à présent votre soirée du 9 février. L’Alliance géostratégique vous invite à échanger et débattre avec Joseph Bahout, enseignant à Sciences Po, chercheur à l’Académie Diplomatique Internationale, sur les implications régionales de la crise syrienne.


Jeudi 9 février 2012 de 19h à 21h (entrée libre)
Café Le Concorde, métro Assemblée nationale
239, boulevard Saint-Germain 75007 Paris.