jeudi 29 mars 2012

Retour sur « Une nuit dans l’espace » : pourquoi il faut des « stars » avec des étoiles plein les yeux

C’est entouré de neuf astronautes français que Michel Drucker a célébré mardi 27 mars les 50 ans de la conquête spatiale au cours d’une émission spéciale de 2h15 diffusée sur France 2. Cette « Nuit dans l’espace » s’inscrit dans la continuité des émissions thématiques (« Une Nuit sur le Charles de Gaulle », « Une Nuit sous les mers », « Au cœur de l’armée de terre, de l’air, etc. ») organisées, selon les propres mots du  producteur, dans le but de « faire connaître de manière divertissante les institutions aux téléspectateurs français, sans que cela soit ennuyeux ».

Le pari est semble-t-il réussi. « On était, estime le blog Un autre regard sur la Terre, dans la catégorie des très bonnes émissions de vulgarisation ». « Michel Drucker et ses invités sont parvenus à expliquer de manière à la fois simple et rigoureuse le fonctionnement de la fusée Ariane, les préparatifs d’un lancement à Kourou, la mise en orbite d’un satellite, la vie dans la station spatiale internationale, le rôle des satellites pour la défense, l’entraînement au centre des astronautes européens, etc. »

De fait, même si l’espace anecdotique et l’espace rêvé ont occupé une grande place lors de l’émission, quelques bons mots ont été dits sur l’espace utile et l’espace des applications. La présence sur le plateau des neuf spationautes français (Jean-Loup Chrétien, Patrick Baudry, Michel Tognini, Jean-Pierre Haigneré, Jean-François Clervoy, Claudie Haigneré, Jean-Jacques Favier, Léopold Eyharts et Philippe Perrin), plus le petit dernier, Thomas Pesquet, et les nombreux collègues européens venus en renfort (dont le Hollandais André Kuipers pour une conversation à 28 000 km/h en impesanteur depuis la station spatiale internationale), justifie d’ailleurs en elle-même le visionnage de l’émission !

Pour (re)voir l’émission, suivre le lien.

Financée à hauteur de 50% (400 000€) par les acteurs du spatial français (Astrium, Safran, Thales, Arianespace, CNES), et d’ailleurs enregistrée sur le site d’Astrium des Mureaux, cette émission visait à « faire connaître le travail qu'ils font, d'informer les députés qui votent les budgets pour la recherche pour l'espace, d'expliquer aux Français à quoi cela sert et, enfin, de donner envie aux jeunes, notamment ingénieurs, de s'investir dans l'espace plutôt que d'aller dans la finance » et de « valoriser et rendre forte la marque 'espace' dans une grande émission ». Cependant, et dans cette perspective, j’aurais sans doute apprécié qu’une plus grande visibilité soit directement accordée à ces acteurs. C’est notamment le cas du CNES qui n’a malheureusement eu droit qu’à quelques minutes en fin d’émission ; et je ne suis pas certain que le téléspectateur ait saisi de quoi il en retournait ni même qu’on fêtait là le cinquantenaire du spatial français (sur la visibilité du CNES, voir ce précédent billet). A noter toutefois que le ministère de la défense – la France, troisième puissance spatiale – a réussi à placer un reportage très intéressant en toute fin de soirée. Reconnaissons également la difficulté de la tâche : aussi bien la richesse du sujet que le nombre d’acteurs impliqués rendent ce genre d’émission difficile à organiser.
Venons-en maintenant au point qui a beaucoup préoccupé les « fanas » d’espace : la présence des « personnalités du showbiz », ces chanteurs, acteurs, etc., incarnées ce soir là par Shy’m, Christophe Willem, Nathalie Simon et Mireille Darc, plus quelques autres sur le plateau. Pour ma part, je dois reconnaître être parti avec quelques préjugés mais avoir été – sauf intermèdes musicaux et promo – agréablement surpris par lexcellente prestation des intervenants et la très bonne tenue des reportages.

Je dis cela d’autant plus sérieusement que je suis convaincu par la nécessité d’un rapprochement entre les acteurs du spatial et les célébrités en tout genre. J’ai ainsi trouvé le vol parabolique de Shy’m dans l’avion Zéro-G très bien vu. Le reportage a constitué un moment fort de l’émission et restera sans doute d’autant plus longtemps dans l’esprit des téléspectateurs que la chanteuse est apparue enthousiasmée par son expérience.
Si jamais le tourisme spatial veut devenir une réalité – c’est-à-dire si les sociétés concernées (Astrium en fait partie) veulent non seulement susciter l’intérêt, mais aussi convaincre les gens, leur prouver que le spectacle vaut le prix du billet et que la sûreté n’est pas à un problème – alors il lui faudra obtenir l’aide des « stars ». Ces dernières sont certainement le mieux placées pour indiquer le chemin, je tente le jeu de mots, des étoiles. Elles incarnent un premier pas vers la démocratisation de l’accès à l’espace. Selon un expert, « If there's more interest, there are more customers. If there are more customers, there's more technical development. It's a positive feedback loop, and obviously that's good ». Virgin Galactic l’a compris et l’a d’ailleurs vite intégré à sa stratégie marketing. Récemment l’entreprise de Richard Branson n’a ainsi pas hésité à rendre public la vente d’un billet à l’acteur Ashton Kutcher, qui plus est son 500e. Qu’attendons-nous donc pour mettre Justin Bieber en orbite ?

Reste une déception. Cette « Nuit dans l’espace » n’a malheureusement pas réussi à séduire le public français qui lui a préféré les programmes des trois autres grandes chaînes (TF1, F3 et M6). L’émission n’est parvenue à attirer que 1 831 000 personnes, soit 7,4% de part de marché, loin derrière Docteur House et ses 7,82 millions de téléspectateurs. C’est bien peu pour une première partie de soirée sur la chaîne publique.

Loin de moi l’idée que l’espace ne parvient pas à mobiliser cependant. J’en veux pour preuve le succès du tweetup organisé hier soir lors de l’amarrage de l’ATV à l’ISS. Je n’ai pas de comparaison disponible, mais les chiffres absolus parlent d’eux-mêmes. Et bravo à lEurope de l’espace !


Source Images

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