mardi 13 septembre 2011

Liens de la semaine (3) Être Américain dans l’ère post-9/11

Certains auront peut-être remarqué l’absence de l’habituel billet du lundi sur Game of Thrones. Veuillez m’en excuser, la série ne reprendra que la semaine prochaine. 11 septembre oblige…
Trouvé ici

En effet, le matraquage médiatique provoqué par l’anniversaire du 11 septembre n’empêche pas certains commentaires – j’espère que cela compte pour ici aussi – de sortir du lot. Mon florilège, en rang d’intérêt croissant, est donc : 

1) Médiatique 

Big Browser, le blog du Monde.fr, nous propose une sélection d’infographies interactives rendant compte de la commémoration du 11 septembre.

2) Economique

Après les annonces faites par Goldman Sachs en 2003 et constamment révisées depuis, le journal The Economist propose, non pas l’actualisation de la date exacte (2030, 2019, 2013 ?) de la « Grande Convergence », mais davantage une confirmation de la future domination économique de la Chine. D’ici 2030, la part occupée par l’économie chinoise dans le monde sera aussi importante que celle prise en 1970 par les Etats-Unis, et même plus grande que celle revendiquée par la Grande-Bretagne en 1870.

3) Politique

La citation politique est de « good old » Francis Fukuyama. Tout d’abord pour dire que les attentats du World Trade Center n’auront pas l’impact que certains leurs prédisaient :
Since 2001 the most important world-historical story has been the rise of China. This is a development whose impact will almost certainly be felt in 50 years' time. Whether anyone will remember Osama bin Laden and al-Qaida at that remove is a different matter.
… Ensuite pour affirmer que, malgré l’ascension de la Chine justement, la « fin de l’histoire » est toujours d’actualité :
Aujourd'hui comme il y a vingt ans, il n'y a pas meilleur modèle d'organisation politique que la démocratie libérale dans le cadre d'une économie de marché. Personne n'a envie de copier les modèles d'organisation politique iranien ou afghan. Le modèle chinois, dynamique économiquement, pourrait constituer une alternative mais politiquement, je ne pense pas qu'on puisse imiter ce système, fruit d'une histoire plurimillénaire. Par conséquent, je considère toujours qu'il n'y a pas d'alternative à la démocratie libérale de marché 
4) Psychologique

Du 11 septembre, c’est certainement le traumatisme subi par l’Amérique qu’il faut retenir. A ce sujet, l’analyse donnée par Roger Launius vaut la peine d’être longuement citée, ne serait-ce que parce qu’elle parle d’espace :  
At several levels there are intriguing parallels between the Sputnik crisis of 1957-1958 that Eisenhower faced and the aftermath of the terrorist attack on the United States made on September 11, 2001. […]
In both instances, these events signaled that the U.S. was not immune from serious challenge to its society and national power. One was a symbolic attack on American might, the other a literal attack. Both sparked a response that led to serious changes in the direction of the nation, and some might argue that in both instances some of the response was ill-conceived. […]
Both were surprises and evoked a public response of shock and then a steeling of resolve not to allow the challenge to go unmet. Feelings of insecurity and in some instances hysteria in Washington abounded in both cases. There was a sense that the nation as a superpower might be at risk and the response needed to be swift and decisive. […]
Interestingly, in both instances the president took criticism for failing to anticipate and react to the challenge, and thereby mitigating it or at least minimizing its impact. […] Eisenhower’s supposed complacency in failing to anticipate Sputnik, and his slowness to react afterward, tarred his administration and his image for a generation. Whether he deserved that criticism is questionable, but his failure to recognize the obvious concern of the public was shortcoming of consequence. Refusing to overreact served his and the nation’s long-term needs well. […]  President Bush, on the other hand, embraced the use of American power in the aftermath of 9/11 and engaged in actions that some believed an overreaction to the perceived threat, especially the invasion of Iraq in 2003.
4) Cinématographique 

Enfin, comment parler de la dernière décennie sans faire référence à Hollywood ? Tom Ricks se demande ainsi quels sont les films étiquetés « 11 septembre » qui ont marqué les dix dernières années :
So where are the memorable 9/11 movies? Is it that not enough time has passed? I can remember back in the 1970s when people were asking the same about the Vietnam war movies, and then a bunch came along, including Apocalypse Now, which is great but flawed, like many of the most interesting works of art.  
Je ne crois pas qu’il faille chercher très loin. Assez rapidement, il y a bien sûr 24 heures Chrono qui vient en tête. Certes, il s’agit d’une série, qui plus est réalisée avant les attentats. Pour autant, qui mieux qu’elle a pu incarner cette dernière décennie ? Outre d’avoir été diffusée pour la première fois en novembre 2001 et d’avoir pris fin en 2010 après 8 saisons, n’a-t-elle pas su représenter à l’écran le genre de questions éthiques soulevées par la lutte contre le terrorisme ?

Mais peut-être que l’approche consistant à chercher les films ayant pris pour base de scénario le 11 septembre ou ayant dû enlever les tours de leurs pellicules, bien qu’intéressante par ailleurs, ne soit pas la plus pertinente. Si l’on veut trouver le film labellisé « 11 septembre », alors il faut certainement étendre l’objet de recherche et visionner l’ensemble des productions parues dans la dernière décennie et dont le récit serait centré sur ce que c’est qu’être Américain après le « nine-eleven ».

Voici ma sélection spontanée, non définitive, ni même détaillée : ces « 11 » films, d’une manière ou d’une autre, abordent la question de l’identité des Etats-Unis et de lévolution de celle-ci au cours de dix dernières années…

Pearl Harbor, mai 2001 


Collateral Damage, février 2001


We were soldiers, mars 2002


Minority Report, juin 2002
A man wearing a leather jacket stands in a running pose. A flag with the PreCrime Department insignia stands in the background. The image has a blue tint, and many flashing lights. Tom Cruise's name stands atop the poster, and the film title, credits, and the tagline "Everybody Runs June 21" are on the bottom.

The Quiet American, septembre 2002


Fahrenheit 9/11, mai 2004


War of the Worlds, juin 2005
An alien hand holds Earth, that is engulfed in flame. A red weed surrounds the hand. Above the image is the film's title, WAR OF THE WORLDS and the main actor, TOM CRUISE. Below is the release date, JUNE 29, and the cast and crew credits.

Syriana, novembre 2005


Rendition, octobre 2007


Trilogie Jason Bourne (juin 2002, juillet 2004, août 2007)


Iron Man (mai 2008 et avril 2010)
Tony Stark is pictured center wearing a smart suit, against a black background, behind him are is the Iron Man red and gold armor, and the Iron Man silver armor. His friends, Rhodes, Pepper, are beside him and below against a fireball appears Ivan Vanko armed with his energy whip weapons.
Beaucoup valent la peine d’être commenter, qu’il s’agisse de l’objectif du réalisateur, du scénario lui-même ou de la réception critique et du contexte dans lequel le film s’inscrit. Pour ma part, je ne m’arrêterai rapidement que sur le premier : Pearl Harbor, sorti dans les cinémas en mai 2001, rediffusé après les événements du 11 septembre, est d’autant plus à sa place dans cette liste que je viens d’évoquer un autre traumatisme, à côté du 11 septembre et de Pearl Harbor…  Spoutnik. Pearl Harbor et Spoutnik, deux crises que l’Amérique remporte avec succès (1945 et 1989-1991) contre un ennemi clairement identifié (Japon et URSS). Le contraste est d’autant plus saisissant.

Et vous, quel film vous a-t-il le plus marqué ?

3 commentaires:

  1. Bonjour,

    juste une question comme ca ,pourquoi dites vous que les USA ont remporté la crise de Spoutnik avec succès? Parce qu'ils ont envoyé un homme sur la lune? D'abord, c'est un défi qu'ils se sont lancé à eux-mêmes, ce n'est donc pas une victoire sur l'URSS mais sur eux-mêmes. Ensuite, qui a envoyé Mir dans l'espace? l'URSS bien sûr.

    Résumons, l'URSS a réussi trois exploits: (1) envoyer le premier satellite, technologie qu'on ne cesse de perfectionner aujourd'hui encore
    (2) envoyer le premier homme vivant, et la première femme vivante par ailleurs, dans l'espace et le faire revenir, procédure annoncant encore un troisième exploit
    (3) lancer et maintenir la première station spaciale habitable dans l'espace, lieu d'expériences scientifiques impraticables sur Terre, donc utile malgré leur coût.

    En revanche, qu'ont réussi les USA?
    Envoyer quelques véhicules habités sur la Lune, qui n'ont servi à rien sauf à prendre en photo la face cachée de cet astre, ce qui a sans doute plu aux fans de photographie, mais dont le reste du monde n'a fichtre rien à faire.

    C'est aberrant.

    Les USA ont remporté une victoire, oui, celle de la propagande. Apparaître comme vainqueurs alors qu'ils ont perdu. Néanmoins, cela n'était pas très difficile de remporter cette compétition de propagande en Europe de l'Ouest, notamment en France, pays qui a préféré demandé l'armistice en 1940 devant l'envahisseur par méfiance de l'URSS.

    Vous n'êtes pas d'accord?

    cordialement,

    Oodbae

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  2. Bonsoir,

    Merci pour ce commentaire. J’avoue cependant être surpris car la position que vous tenez (les US, dragon de papier) me semble difficilement tenable. Le propos doit plutôt être inversé.

    Loin de moi l’idée de rabaisser les exploits que vous citez (Spoutnik, Gagarine - Valentina Terechkova reste anecdotique, une répétition au mieux - Saliout/Mir). Il s’agit effectivement de grandes « premières » auxquelles les Etats-Unis n’ont pas su répondre dans un premier temps.

    N’en demeure pas moins que le programme spatial soviétique n’avait, au moins jusque dans les années 1960, qu’un seul objectif, la propagande et le prestige. (D’ailleurs la première photo de la face cachée de la Lune – qui ne sert à rien me dites-vous – est soviétique.) Pour le coup, tout le contraire des Etats-Unis.

    A étudier le « big picture », il faut en effet garder en tête que ce n’est pas une, mais deux courses à l’espace qui ont lieu durant la guerre froide :

    1) La première avait pour objectif le prestige. L’URSS a ici longtemps devancé les Etats-Unis. D’où le traumatisme répété provoqué chez les Américains : Spoutnik, Lunik, Gagarine. Jusqu’à ce que les Etats-Unis l’emportent finalement avec le programme Apollo.

    - A noter que cet espace, « aberrant » peut-être, n’est pas sans conséquence sur la réalité des relations internationales. L’espace est une vitrine. Si vous regardez les sondages des années 50 et début 60, vous verrez qu’une large part de la population de l’Europe de l’Ouest (France et Grande-Bretagne notamment) croit voir dans l’espace la preuve de la supériorité militaire, scientifique et technologique, et donc sociale, économique et idéologique de l’URSS.

    - A noter aussi que l’on peut justifier une station spatiale par les (quelques) expériences que l’on y pratique, mais nous restons tout de même dans le cadre du prestige. Ce n’est pas pour rien que l’URSS, en perte de visibilité après Apollo, invitait des cosmonautes de nations étrangères « amies » (y compris la France).

    2) La seconde avait pour champ de bataille l’espace militaire, notamment les applications que l’on pouvait faire des satellites. Ici, l’avantage a rapidement été aux Américains (observation, communication, météorologie).

    - A noter ici que si l’URSS a envoyé le Spoutnik, elle n’a pas de suite compris l’usage qu’elle pouvait faire des satellites. Et comment le pouvait-elle alors que son programme spatial était entièrement concentré sur l’espace-prestige ?

    - A contrario, les Etats-Unis ont de suite mis l’accent sur le programme de reconnaissance. De fait, il s’agissait ici d’un impératif stratégique étant donné le « missile gap » que l’URSS leur vendait (grâce à l’espace-prestige) et le secret qui par ailleurs entourait l’Etat totalitaire.

    La vérité est que l’espace est une vitrine. Les Etats-Unis ont remporté les deux courses face à une URSS qui, économiquement, ne pouvait guère lutter.

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  3. Rappelons que si les cosmonautes soviétiques ne sont pas allé sur la Lune, alors que les impérialistes yankees avaient réussi, c'est que leur programme lunaire n'est vraiment pas au point avec les N-1 qui explosaient les uns après les autres.

    Le Kremlin à enterré le programme - au sens propre comme au figuré - en 1974.

    L'article généraliste sur le wiki auquel j'ai modestement contribué est assez édifiant :

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Programme_lunaire_habit%C3%A9_sovi%C3%A9tique

    Concernant l'espace militaire, il est indiscutable que dès les années 1970, les senseurs de tout types mit en orbite par les USA étaient supérieurs aux innombrables satellites soviétiques dont la durée de vie étaient limités à quelques semaines voir quelques jours, d'ou les lancements à un rythme effréné par l'URSS.

    L'USAF est de nos jours la seule armée de l'air à disposer de ses propres ''navette'' - le X-37 et si elle n'a pas mit en orbite la première station spatiale, c'est que le ''Manned Orbital Laboratory'' s'est retrouvé dépassé avec les performances des satellites espions.

    Et franchement, entre la masse des premières stations Saliout (19 t.) et Skylab (90 t.), il n'y a pas photo.

    Concernant les stations spatiales, j'aurait préféré, au niveau du ''rêve'' que l'on investissent, dans les années 2000/2010, les sommes impressionnantes mit dans l'ISS dans un retour permanent sur la Lune. Le coût auraient sans doute équivalent.

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