vendredi 25 mai 2012

[MAJ] En Mai : La reconquête de l'espace

Je vous annonce la tenue, le 29 mai prochain, au CNES à Paris, de la 8eme conférence Géoéconomie organisée par l’Institut Choisel.
Les sujets d’intérêts ne manqueront certainement pas : qu’il s’agisse de la nouvelle course à l’espace, ou devrais-je dire du « capture the flag moment » pour reprendre les mots du président Obama, disputée par les nouvelles sociétés commerciales, ainsi de SpaceX dernièrement, ou de manière plus large, des multiples questionnements géopolitiques et de prestige relatifs au renouvellement, ou non, des ambitions américaines, aux futurs plans russes ou encore aux décisions chinoises concernant l’évolution de leur programme habité (Shenzhou, Tiangong, etc.), et j’en passe...

A noter que cette conférence, gratuite et ouverte au public, sera organisée à l’occasion de la parution du numéro de printemps de la revue Géoéconomie que coordonne Xavier Pasco (FRS) et que signent plusieurs contributeurs prestigieux, dont le président du CNES.

Inscription obligatoire à : institutchoiseul@gmail.com
Renseignements : Institut Choiseul – 01.53.34.09.93
Conférence organisée avec le soutien du CNES et de la DAS

MAJ : Pour ceux que la question intéresse, ci-joint le sommaire du dossier consacré à la reconquête de l’espace...

Quel nouveau départ pour l’activité spatiale ? Xavier PASCO
La place du CNES dans le paysage spatial international | Yannick D’ESCATHA
Une ambition spatiale pour l’Europe : quelle vision française à l’horizon 2030 ? | Emmanuel SARTORIUS
La politique spatiale américaine : entre changement et continuité | John LOGSDON
Russie, Japon, Chine, Inde : quelles politiques spatiales en 2012 ? | Isabelle SOURBES-VERGER
Ecrire l’avenir de lo’Espace, le projet d’Astrium | François AUQUE
« L’Europe spatiale reste à construire » | Reynald SEZNEC
«Garantir la liberté d’action dans l’ESpace» | Général Yves ARNAUD
Les enjeux d’un développement duirable des activités spatiales | Gérard BRACHET
L’Espace européen après Lisbonne | Géraldine NAJA

mardi 22 mai 2012

SpaceX en route vers l'ISS

Tôt ce matin, la société américaine SpaceX a procédé avec succès au lancement de la capsule Dragon portée par la fusée Falcon 9. Dix minutes après que celle-ci se soit arrachée de son pas de tir de Cape Canaveral, Dragon atteignait en effet l’orbite terrestre. Une fois les deux grands panneaux solaires déployés, la capsule était enfin prête pour conduire la première mission privée à destination de la station spatiale internationale (ISS). Selon @elonmusk, « Falcon flew perfectly!! Dragon in orbit, comm locked and solar arrays active!! Feels like a giant weight just came off my back :) »

L’événement est à l’image de l’attention populaire dont cette re-conquête de l’espace fait l’objet. Le lancement de ce matin a été largement suivi sur internet, qu’il s’agisse du site de retransmission par webcam de la NASA ou de l’émission spéciale organisée par SpaceX. Sur Twitter, #DragonLaunch est également passé au premier rang des tendances mondiales durant plusieurs minutes, suivi de près par International Space Station. Il faut dire que le lancement interrompu samedi dernier à la toute dernière seconde, après détection automatique d’une anomalie au niveau d’un des neufs moteurs du premier étage Merlin du lanceur, a tout fait pour créer le suspens.


Il faut aussi rappeler que la mission de 2012 – repoussée à maintes reprises – est historique : d’ici vendredi Dragon pourrait très bien devenir le premier vaisseau privé à s’amarrer à l’ISS, n’étant précédée que par les Etats-Unis, la Russie, le Japon et l’Europe. Dans quelques jours, les deux astronautes européen et américain, André Kuipers et Don Pettit, seront ainsi chargés d’attraper la capsule avec le bras robotique canadien de l’ISS. Cette opération – longue et précise – devrait démontrer que, avec ce second vol de Dragon, le troisième pour Falcon, SpaceX maîtrise les conditions d’amarrage à l’ISS. Qui plus est, contrairement aux ATV européens, HTV japonais ou Progress russes, Dragon ne sera pas brûlée dans l’atmosphère terrestre. Encore que cette ultime partie ne soit qu’une répétition : l’entreprise de Elon Musk a déjà accompli cette prouesse en devenant en 2010 la première compagnie privée à récupérer sa capsule tombée depuis l’espace, chose qui n’avait été réalisée que par six pays.
SpaceX est de fait la société spatiale commerciale la plus avancée. Après dix d’existence et un milliards de dollars dépensé, elle a désormais plusieurs contrats à son actif. Dans le cadre de COTS, la NASA a ainsi commandé douze vols à l’entreprise pour une valeur de 1,6 milliards de dollars. Cette dernière se situe également dans une excellente position pour remporter le marché du transport d’astronautes américains vers l’ISS, l’enjeu véritable aujourd’hui alors que les Etats-Unis sont dépendants des Soyouz russes. La société californienne a bénéficié pour cela des largesses financières de la NASA, ainsi que de son expertise technique. Selon l’Agence spatiale américaine, à terme, le coût sera 4 à 10 fois moindre dans le cadre d’un partenariat public-privé que si jamais la NASA avait financé directement, comme par le passé, cet effort là.
Elon Musk vise cependant plus haut. D’ici 5 ans, il a affirmé qu’il ferait un vol orbital en compagnie des premiers touristes de l’entreprise. Cela équivaudrait à quitter l’atmosphère terrestre avant que le vaisseau Orion de la NASA ne soit achevée. Si ce calendrier de 2017 est maintenu, SpaceX pourrait entreprendre des séjours plus ambitieux au-delà de l’orbite terrestre d’ici 2019-2022. 


Pour plus dimages

dimanche 20 mai 2012

Bilan : Pour l’exploration de l’espace ? (Partie 3)

Pour, contre l’exploration de l’espace ? Il n’y a sans doute pas de réponse définitive ni d’ailleurs exclusive. Les justifications sont de fait nombreuses et multidimensionnelles, certaines construites a posteriori, d’autres anticipées. Le blog allié Le Fauteuil de Colbert met par exemple en avant, non sans évoquer une certaine proximité intellectuelle avec la thèse astropolitique, une argumentation géopolitique sur la base du contrôle des ressources et des lignes de communication. Un tel schéma n’a rien d’inévitable. La coopération peut l’emporter sur la compétition, tout comme de nouveaux acteurs peuvent s’engouffrer dans la brèche et prendre le pas sur les Etats : le néomédiévalisme est après tout populaire aussi bien IRL qu’au cinéma (Alien, 1979-1997 ou Avatar, 2010 parmi ceux déjà cités, Dune, 1984 ou Blade Runner, 1982 parmi les autres).
File:Blade Runner poster.jpgFile:Duneposter.jpg
Des six raisons décrites précédemment, je vous l’accorde les trois premières peuvent aisément être balayées. Mais seulement parce que l’argument d’autorité, à la fois ad verecundiam (respect) et ad potentiam (pouvoir) si j’en crois mon Schopenhauer préféré, l’emporte. Qui suis-je en effet pour oser me mesurer au grand président américain, John F. Kennedy :
« But why, some say, the moon? Why choose this as our goal? And they may well ask why climb the highest mountain? Why, 35 years ago, fly the Atlantic? Why does Rice play Texas? We choose to go to the moon in this decade and do the other things, not because they are easy, but because they are hard, because that goal will serve to organize and measure the best of our energies and skills, because that challenge is one that we are willing to accept, one we are unwilling to postpone, and one which we intend to win, and the others, too »
 
Cette « can-do » attitude que l’Amérique projette face au reste du monde, les astronautes l’incarnent au niveau de la société. Tom Wolfe a su mieux que personne décrire ce dédoublement. Comme je l’indiquais dans un précédent billet, le personnage central de son ouvrage est en effet autant le groupe des « Original Seven » que l’Amérique elle-même : The Right Stuff s’adresse à la fois aux aviateurs et astronautes qui cherchent à « pushing the outside of the envelope » de leurs appareils et aux Américains « left behind » en lutte avec l’URSS pour la suprématie technologique et morale dans l’espace. Dès lors un héros peut-il avoir peur de mourir ? « They had volunteered to sit on top of rockets – which always blew up! They were brave lads who had volunteered for a suicide mission! […] And all the questions about wives and children and faith and God and motivation and the Flag… they were really questions about widows and orphans… and how a warrior talks himself into going on a mission in which he is bound to die ». De ce point de vue, le mythe de l’espace comme nouvelle frontière est validé par deux fois : l’expérience est à la fois collective(-iste), et individuelle(-iste). Ainsi, selon les propres mots du président Johnson, « If there is an ultimate truth to be learned from this historic flight, it may be this: There are few social or scientific or political problems which cannot be solved by men, if they truly want to solve them together ». Quant aux astronautes, confrontés à un danger pour leur propre vie, ne collent-ils pas à l’image du cowboy, un brin individualiste mais courageux et résolu, coupable en cela d’un « true grit » pour reprendre l’expression consacrée qui, récemment encore, était portée sur nos écrans. (Est-ce d’ailleurs pour cela que l’univers de la NASA et des autres agences spatiales est si profondément misogyne ?) 

Cette image est brillamment reprise dans Space Cowboys (2000) de Clint Eastwood. Très brièvement : le film montre un équipage de retraités prendre le chemin des étoiles afin de réparer un vieux satellite russe dont plus personne ne connaît les plans, et qui se révèle être, ultime vestige de la guerre froide, un magasin à têtes nucléaires. L’originalité est en effet ailleurs : Space Cowboys parvient à récréer la tension existante entre les vieux « frontiersmen » qui ont la connaissance et la compétence nécessaires à la « conquête » de l’espace, mais qui sont en dehors du système, et les jeunes « organization men » qui dominent le deuxième âge de l’espace. Seuls les premiers – les pionniers – montreront leur capacité à lutter contre les événements et, finalement, à « (re-)conquérir » l’espace, y compris au prix du sacrifice.


Ceci étant dit, il nous faut admettre que les trois arguments suivants sont a priori plus difficiles à opposer. Ce serait sans compter sur la science-fiction et le cinéma, aussi facilement coupables d’irresponsabilité lorsqu’il s’agit de traiter avec les « méchants aliens », qu’ils ne s’embarrassent des problématiques éthiques lorsqu’il est question des « gentils indigènes ». Et de fait, pour prendre deux exemples récents, ni Jake Sully (Avatar, 2010), ni John Carter (John Carter, 2012) ne semblent se préoccuper un seul instant de la réaction de la tribu locale ou de l’amoureux éconduit après le « ravissement » dont leurs femmes/princesses, Neytiri et Dejah Thoris, font l’objet. Au moins John Dunbar/Danse avec les Loups était-il plus « honnête » en prenant pour femme une indienne « blanche ».
Certes le héros intergalactique, un Pâris finalement plus sensé que l’original, finit par intégrer la nouvelle tribu, renonce et à sa patrie (John Carter est Warlord of Barsoom, ainsi que père d’un enfant né d’une union mixte) et à son humanité (Jack Sully fait plus fort et devient un Na’vi au sens physique du terme). Pour autant, c’est également ici que l’on voit comment le futur rejoint le passé, la science-fiction, la fiction pré-historique (qu’il s’agisse de la Guerre du feu, 1981, de 10 000 BC, 2008 ou de Pourquoi j’ai mangé mon père) et comment l’exploration du monde et de l’univers est une chose plus simple à comprendre que nous l’aurions crue. Alors, résumons : le goût du risque et du sexe faible ; est-ce tout ?

Que l’on me permette de finir sur une analogie avec le fameux épisode de la « grotte du Mal » dans Star Wars, épisode V : L'Empire contre-attaque (1980). « What’s in there ? » demande l’apprenti au Maître Jedi. « Only what you take with you! » (« Seulement ce que tu y apportes »). Ainsi, bien que Maître Yoda ait expliqué à son jeune apprenti l’attrait du côté obscur (« Anger, fear, aggression... easily they flow, quick to join you in a fight »), Luke Skywalker se décide à entrer dans la grotte armé de tout son équipement (sabre et pistolet), agressif et prêt à en découdre, d’où l’apparition de Dark Vador et le duel et la terrible découverte qui s’en suivent.


Il en est de même de l’exploration de l’espace. Aller dans l’espace, c’est découvrir l’humain qu’il y a en nous, au sens où « le faire est un révélateur de l’être » mais également parce que, pour reprendre les mots de Carl Sagan, « Spaceflight speaks to something deep inside us ». Il contient « a new recognition, still slowly overtaking us, of our coordinates, our place in the Universe – and how, even if the call of the open road is muted in our time, a central element of the human future lies far beyond the Earth ». 


lundi 14 mai 2012

Contre l’exploration spatiale (sic) : six raisons pour lesquelles l’homme ne doit pas quitter le berceau terrien (Partie 2)

… suite de la première partie
4) De bien dangereuses rencontres

Encore que comme Sam (Moon, 2009) ou Kris (Solaris, 1972) le ressentent bientôt, il y a quelque chose de pire que d’être seul dans l’espace… n’être pas seul. Certes, Wallace et Gromit (A Grand Day Out, 1989) ont la chance de tomber sur un être relativement bienveillant. Même s’il fait l’expérience des geôles de la terrible Reine Yllana, l’équipage de Queen in Outer Space (1958) n’est pas totalement malheureux non plus. Il faut dire que les premiers s’établissent sur la Lune, qui comme chacun sait est un immense fromage, pour y piqueniquer, et que le second fait une découverte terrible ô combien désagréable en débarquant sur Vénus. Inutile de dire que tout le monde n’est pas aussi fortuné.

Les astronautes d’Apollo 18 (2011) pourraient en témoigner s’il n’était déjà trop tard pour leur poser la question. De ce point de vue, John Crichton, dans la série télévisée Farscape (1999-2003), est plus heureux, mais son calvaire est également beaucoup plus long et sa détresse manifestement immense. Comme l’indique l’introduction : « My name is John Crichton, an astronaut... a radiation wave hit and I got shot through a wormhole... Now I’m lost in some distant part of the universe on a ship -- a living ship -- full of strange, alien life forms... Help me... Listen, please. Is there anybody out there who can hear me? I'm being hunted by an insane military commander... doing everything I can... I’m just looking for a way home.  »

5) Bien plus qu’un voyage

Mais il y a bien plus en jeu que la simple survie de ces « envoyés de l’humanité » que sont les astronautes. Sur les épaules de ces derniers repose en effet l’avenir de notre planète. Du moins si l’on en croit Hollywood. La saga Alien (1979-1997), y compris la préquelle qui arrive cette année dans les salles, n’est ainsi pas autre chose qu’une course de vitesse pluriséculaire engagée par deux races, l’humanité – incarnée par Sigourney Weaver/Ellen L. Ripley – et des créatures aliens particulièrement redoutables, et dont le prix n’est rien moins que la Terre elle-même. La série Stargate et ses multiples versions (1997-2011) est plus explicite encore. Une fois la Boîte de Pandore ouverte, i.e. l’exploration de l’espace entamée, aucun retour en arrière n’est possible. Symbolisée par la maîtrise de la technologie de la « porte des étoiles » (Stargate, 1994), cette problématique apparaît dès les premiers instants de la série lorsqu’un E.T. franchit agressivement la porte et menace donc directement la Terre. La franchise développe sur ce thème du « dilemme de sécurité » en passant d’un ennemi ontologique à un autre, ainsi des goa’uld, des Ori (Stargate SG-1) et des Wraith (Stargate Atlantis). 
Pour vivre heureux, vivons cachés ? Ce cliché philosophique possède aujourd’hui des résonances intergalactiques insoupçonnées, positives (Contact, 1997) ou négatives (Battleship, 2012). L’impact n’est d’ailleurs pas que cinématographique : rappelons que les sondes Pioneer (10 et 11) et Voyager (1 et 2) emportent en leur sein des cartes du système de solaire.
File:Pioneer plaque.svg

6) Des interrogations éthiques

Le questionnement devient donc éthique. Une fois encore SETI domine la littérature et le cinéma de science-fiction. Ainsi d’une rencontre avec une intelligence supérieure. Dans 2001: A Space Odyssey (1968), la découverte de TMA-1, le monolithe noir enfoui dans le cratère de Tycho, va bouleverser l’histoire de l’humanité. De quoi réfléchir aux conséquences du voyage spatial puisque le moindre développement est sans doute l’apparition d’une nouvelle espèce, explicite dans 2010: Odyssey Two (1982 pour le livre, 1984 pour le film). Il en est de même dans le cas d’une confrontation symétrique. Dans Ender’s Game et ses suites, l’humanité, obligée de déclarer la guerre à une race extra-terrestre, se retrouve avec un génocide sur les bras et un véritable traumatisme dont le passage des millénaires et la colonisation continue de la galaxie ne parviendront pas à effacer totalement le souvenir. Naturellement, la réflexion n’est que plus forte lorsqu’il est question de rencontre asymétrique. Certains penseront à Avatar (2010). Pour ma part, je préfère m’appuyer sur le Voyage dans la Lune (1902) de Georges Méliès. En effet, à voir l’image de notre satellite transpercé par une fusée, n’y a-t-il façon plus violente de débuter l’aventure spatiale ? La suite n’est guère mieux, la rencontre avec les Sélénites – de bien fragiles créatures – tournant rapidement à la bagarre. 


La question du traitement des « indigènes », quelle que soit leur forme, n’est pas que fictionnelle. Les sondes que nous envoyons dans l’espace sont soumises à des processus de stérilisation sévères : il s’agit en effet d’éviter d’amener, par exemple sur Mars, des microorganismes terrestres capables de contaminer la planète, de détruire les formes éventuelles de vie, etc. et, il est vrai, de fausser toutes mesures. Dans cette perspective, que penser de la terraformation ? Sous prétexte qu’aucune vie intelligente n’y réside, l’univers nous appartient-il ? La survie de l’espèce humaine, l’élément déclencheur dans Red Planet (2000), est-elle une raison suffisante ? 


... à suivre !!

jeudi 10 mai 2012

Contre l’exploration spatiale (sic) : six raisons pour lesquelles l’homme ne doit pas quitter le berceau terrien (Partie 1)

Enterprise
La Terre est le berceau de l’humanité, 
mais on ne passe pas sa vie entière dans un berceau.

… à moins que comme Hercule-enfant des serpents ne viennent nous chercher noise – il est vrai un poncif du cinéma hollywoodien de science-fiction, qu’il s’agisse d’extra-terrestres désireux d’étendre leur Lebensraum au détriment de nous autres humains (Independence Day, 1996 ; Transformers, 2007-2011 ; Skyline, 2010 ; Battle: Los Angeles, 2011 et récemment encore Battleships, 2012) ou d’astéroïdes pressés de bousculer une fois encore la Terre et ses habitants (Armageddon, 1998 ; Deep Impact, 1998 ou de manière plus originale Melancholia, 2011). Pourquoi, pourquoi ne pouvons-nous pas rester sur Terre ?

Ce qui suit se veut bien entendu léger et amusant. Pour autant notre interrogation est loin d’être gratuite : la question est après tout légitime et vaut la peine d’être posée. L’exploration spatiale repose en effet sur les épaules du contribuable et doit donc en conséquence faire l’objet d’un débat au sein de la Cité. Encore que les termes de celui-ci soient légèrement biaisés : contrairement à la vision défendue par quelques-uns, ainsi de Carl Sagan et de Wernher von Braun, l’avenir spatial de l’humanité n’a rien d’inévitable ni de naturel. Une telle image ne peut reposer que sur une construction qui, pour être agréable, n’en est pas moins artificielle, comme l’extraordinaire récit produit par le politologue américain Howard E. McCurdy, Space and the American Imagination, peut en témoigner.

Sans plus attendre…

1) (Dure) retour à la réalité

L’espace n’a rien de romantique. Bien entendu l’analogie de la Nouvelle Frontière nous a préparé aussi bien à l’idée que la conquête du cosmos est faisable, qu’à celle selon laquelle elle ne sera pas pour autant facile. Et nous en apprenons tous les jours sur ce très vaste et largement inexploré sujet de l’adaptation humaine à l’espace : outre les problèmes psychologiques inhérents à la cohabitation dans un espace contigu et étroit (tensions entre explorateurs, routine des repas où la nourriture n’est pas très variée, confort étranger à la vie terrestre – hygiène, sommeil, etc.), auxquels s’ajoutent l’éloignement de la Terre et la difficulté de communication avec celle-ci, existent également les quelques impondérables physiques auxquels nous autres pauvres mammifères ne sommes pas habitués (vie en faible gravité, mal de l’espace, conséquences musculaires et squelettiques).
Les colonies spatiales, imaginées par Gerard O'Neill
2) Une entreprise risquée

Reste que l’avènement de l’Homo Cosmos ne peut pas tout résoudre : en effet, le voyage spatial peut aussi réserver de mauvaises surprises en lui-même. Ainsi, Han Solo a beau disposé d’un magnifique Faucon Millenium qu’il répare, avec l’aide de son fidèle second, Chewbacca, au fond de son garage, comme vous et moi le feriez de votre moto ou de votre voiture, la réalité est bien évidemment différente. Et de ce point de vue, la fiction a encore beaucoup à faire pour rattraper les faits même si l’effort est apprécié, que celui-ci ait pour objet les alentours de la Lune, avec l’équipage de Destination Moon (1950) ou Tintin et ses amis (1954), ou de Mars, avec les astronautes de Mars-1 victimes d’une éruption solaire aussi soudaine que violente dans Red Planet (2000) ou ceux de Mars-II pris au piège d’une pluie de météorite dans Mission to Mars (2000). La preuve, un film a même été produit : Apollo 13 (1995). Pour rappel, la mission Apollo 13 a décollé le 11 avril 1970 de son pas de tir en direction de la Lune. Elle n’a cependant jamais pu atteindre sa destination ; en cause : l’explosion de l’un des réservoirs d’oxygène. L’appel lancé par l’astronaute Jim Lovell est resté célèbre : « Houston, we‘ve had a problem ». Tout aussi fameux a été l’exploit qui a consisté à ramener l’équipage sain et sauf, en lui faisant faire, non pas un demi-tour, mais un survol orbital de la Lune afin de donner l’impulsion nécessaire au vaisseau pour rentrer sur Terre. Pour Lovell, Apollo 13 a été « a successful failure » ; pour les Américains, paradoxalement, cela n’a rendu que plus forte la confiance en la NASA et en ses « space geeks » que sont les ingénieurs du programme spatial américain.


3) Un voyage solitaire

Il faut cependant noter que le trio d’astronautes d’Apollo 18 (2011) n’a guère fait mieux. La raison est à chercher ailleurs, du côté d’un film bien meilleur dont la suite est d’ailleurs attendue cette année : Alien (1979) ; tout simplement, le fait que « in space, no one can hear you scream ». Encore que la vérité soit plus terrible encore : dans l’espace, la solitude nous guette. Telle est ainsi l’expérience vécue par Sam Bell, un employé d’une entreprise d’extraction d’hélium 3, dans Moon (2009). Telle est aussi, et de manière beaucoup plus intéressante à mon avis, l’histoire que raconte Solaris (1972), un film réalisée par Andreï Tarkovski dans lequel le héros entretient une relation avec une entité intelligente qui le dépasse et des souvenirs qui deviennent réalité.


A suivre...

jeudi 3 mai 2012

« Traques sur le net »

Pour la seizième édition des Cafés stratégiques, le 10 mai prochain, l’Alliance géostratégique vous invite à venir nombreux écouter Eric Freyssinet, en charge de la lutte contre la cybercriminalité au pôle judiciaire de la gendarmerie nationale et auteur du blog Criminalités numériques, qui interviendra à titre personnel.
Le thème de la soirée sera consacré aux « Traques sur le Net », l’occasion d’aborder les questions de cybercriminalité, ainsi que les méthodes utilisées par les forces de l’ordre dans le cyberespace. Comme pour les éditions précédentes, ce Café stratégique aura lieu à partir de 19h au café Le Concorde, 239 boulevard Saint-Germain à Paris (métro Assemblée Nationale). Entrée libre bien évidemment, l’achat d’une consommation – pensez à notre hôte – est cependant recommandé.

J’ajoute la tenue le 14 mai à l’Ecole militaire d’un colloque intitulé « Se révolter au XXIe siècle » auquel plusieurs alliés participeront. L’information est disponible ici sur le site de l’Alliance.