Cette semaine Newt Gingrich, candidat à la nomination
républicaine, a annoncé
que s’il était élu les Etats-Unis auraient leur première base lunaire d’ici
2020. Celle-ci pourrait même prétendre au statut
d’Etat membre de l’Union une fois le seuil de population dépassé. Cette
proposition n’aura pas manqué de faire sourire
ses adversaires – aux premiers rangs desquels Mitt Romney, le favori
actuel, pour qui « it may be a big
idea but it’s not a good idea ».
Un tel retour sur la Lune est certainement quelque chose que
la communauté spatiale désire depuis longtemps. On peut donc comprendre certaines
des réactions enthousiastes qui ont embrasé la communauté depuis mercredi
dernier. N’en demeure pas moins que ce n’est pas la première fois qu’une telle déclaration
est faite par un décideur aux Etats-Unis. De fait, si Kennedy, proclamant en 1961 que « I believe that this nation should commit itself to achieving the goal,
before this decade is out, of landing a man on the Moon and returning him
safely to the Earth », avait pu lancé un « crash program » qui atteignait son objectif moins de dix ans plus
tard, avoir une « vision » ne suffit pas. En témoignent les différentes
initiatives revendiquées depuis. Il y a de grande chance que le discours de Gingrich laisse la même postérité. Selon John Logsdon, spécialiste américain du spatial, cité par Space.com, « When we are not expecting a U.S. crewed launch to the ISS until 2016-2017 and are just getting started on a lunar-class launch vehicle, establishing a lunar outpost by 2020 is a fantasy. It would be much better to set realistic goals, but that is not Mr. Gingrich’s strong suit ».
Mais pourquoi retourner sur la Lune ?
Voilà une question à
laquelle je tâche de répondre, après Wallace & Gromit et beaucoup
d’autres, depuis un certain temps déjà (voire les billets 1,
2,
3
et 4).
Il me semble opportun de conclure aujourd’hui.
De fait, Newt Gingrich ne s’est guère attardé sur cela, évoquant
parfois l’ambition de la Chine, d’autre fois les ressources minières que
pourrait receler le sol sélène. Or ces « motivations » sont de fait
plus ou moins biaisées.
Ainsi pour la dimension économique (voir le billet
correspondant). Non seulement les perspectives de richesse sont peut-être exagérées,
en tout cas pour notre technologie actuelle, mais cet argument s’appuie en
outre sur un modèle de la frontière – l’individu, partant seul à la conquête de l’Ouest – qui n’est pas forcément pertinent pour
l’espace.
Pour ce qui est de l’aspect militaire (ou ayant trait à la
sécurité nationale), là encore, l’intérêt pour notre satellite est largement
fantasmé. Le débat reste bien sûr ouvert (comme entamé dans mon billet)
mais, pour le moment, la Terre – voire au maximum l’orbite terrestre – semble nous
suffire.
Quant au prestige (voir le billet),
des trois, il semble offrir l’argument le moins contestable aujourd’hui – notamment
en lien avec les programmes supposés dynamiques des nouvelles puissances
émergentes et avec ce que certains qualifient de « course ».
Mais qu’en est-il vraiment ? Rappelons que la Terre n’a qu’un seul
satellite et que la Lune semble donc constituer une destination logique pour un
premier programme de robots-sondes, sans qu’il faille pour cela lui surajouter
l’effet d’une rivalité internationale. Qui plus est, je ne suis pas sûr que la
guerre froide – dont certains appellent de leurs vœux le retour sous une forme
ou une autre – puisse être, à elle seule, un modèle pertinent, et surtout stable, sur lequel construire l’exploration spatiale.
Alors faut-il retourner sur la Lune ? Je n’ai pas
d’avis définitif sur la question. Soulignons seulement que le seul fait de se
poser la question est déjà en soi une réponse. Il ne s’agit pas tant d’une
question de volonté que de moyens. Pour cause, le problème avec le spatial est que
le budget définit souvent la stratégie. Tant que la technologie n’existera pas
ou ne sera pas suffisamment mature, alors le débat continuera. Ce n’est qu’avec
des moyens bon marché que l’humanité cessera de se poser la question du
pourquoi de l’exploration, de son coût et de ce à quoi cet argent pourrait
servir ici sur Terre. Aussi Romney a-t-il répondu à son rival qu’il préférait « re-building housing here in the U.S ».
Mais en dehors des moyens, il reste… l’imagination (voir billet).
Aussi puis-je retenir de cette énumération l’idée que la principale motivation
pour un retour sur la Lune restera liée à l’imagination. Ne colore-t-elle d’ailleurs
pas chacune des approches offertes ci-dessus, qu’elles soient politiques,
économiques ou militaires ?
Une telle position soutenue dans un blog s’intitulant De la Terre à la Lune ne devrait pas
surprendre. Mais il est vrai que la Lune a toujours occupé une place spéciale
dans l’histoire de l’humanité et tout particulièrement depuis les débuts de l’âge
spatial. Pour Roger
Launius, « From the first clear
images of the Moon to the last landings in the 1970s and to the present the
body has held a fascination that propels the space program ». Alors…
Newt Gingrich à perdu en Floride. L'Espace en temps que tel ne fait plus rêver les électeurs républicains.
RépondreSupprimerLa défaite de Gingrich était prévisable, ne serait-ce que parce que l'espace n'a jamais constitué un enjeu de campagne. (J'étudierai cela dans un prochain billet.) Qui plus est, sur ce terrain même, Romney était parvenu à s'entourer de conseillers crédibles (Mike Griffin, Scott Pace...) quand Gingrich ne réussissait qu'à obtenir la bénédiction du Tea Party et les critiques des autres. Il en reste tout de même pour saluer l'idée : peut-être n'est-elle donc pas morte !
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