Outre être tombé d’accord sur le niveau des ressources de l’ESA
pour la période 2013-2017, le Conseil a accepté diverses autres propositions relatives
au programme scientifique obligatoire (Gaia, LISA Pathfinder, BepiColombo,
Solar Orbiter, Euclid et JUICE), à l’avenir des relations entre l’ESA et l’Union
européenne (Galileo, GMES, etc.), tout en confirmant l’engagement européen vis-à-vis
de l’exploitation de la Station spatiale internationale (ISS). Les ministres
ont notamment accepté que l’Europe fournisse, au titre du « barter element » et grâce à l’expérience
de l’ATV, le module de service du nouveau véhicule de transport d’équipage
polyvalent Orion de la NASA (MPCV). Cette décision, due en partie à la
délégation britannique qui a accepté au dernier moment de verser 20 millions au
projet (« The UK is on the space station.
It’s a historic moment » a indiqué Dordain), en partie aux résultats
des négociations entre Français et Allemands vis-à-vis du futur lanceur Ariane
(la France contribuera à hauteur de 20%, un développement qu’elle avait
auparavant critiqué pour son peu d’intérêt politique et technologique), a été
jugée, à en croire le communiqué
de presse, « d’une importance stratégique pour l’Europe », car « elle
ouvrira la voie à une coopération entre l’ESA et la NASA sur le futur système
de transport spatial habité ». Le projet ExoMars, mis en danger après l’annonce
du départ de la NASA, a par ailleurs été confirmé : la Russie contribuera
donc, par l’intermédiaire de son lanceur Proton, à l’exploration européenne de
la planète rouge en 2016.
Le principal dossier, de fait certainement le sujet de
discussion le plus polémique du programme optionnel, concernait l’avenir de la
filière Ariane. Un compromis a ainsi été trouvé entre l’option défendue par l’Allemagne,
Ariane 5 ME pour « évolution à mi-vie » (coût de 2 milliards), et la
position française, Ariane 6, moins puissante et moins chère qu’Ariane 5, mais
également plus adaptée à l’évolution du marché (coût de 4 milliards), sans qu’une
stratégie réelle n’ait pour autant été identifiée. La solution a consisté à
remettre à dans deux ans la décision finale : aucun projet n’est intronisé
en particulier, aucun n’est non plus bloqué ; des investissements sont
alloués des deux côtés, d’une part, aux études de définition détaillée d’Ariane
6, dans l’idéal annoncée pour 2021, pour un total de 157 millions, d’autre
part, à la poursuite du développement pour 187 millions de la version adaptée d’Ariane
5 avec un premier vol prévu pour 2017, tout en tâchant de multiplier les synergies
entre les deux lanceurs (moteur Vinci) équivalant à 244 millions.
La presse anglo-saxonne a qualifié de victoire allemande le
compromis établi : ainsi de BBC News
pour qui « Germany won »,
ou de SpaceNews, « Germany
Wins Battle over Ariane ». Dans l’ensemble, ces médias ont en
effet jugé que l’option Ariane 6 était la plus logique étant donné la menace que
représentent les fusées Falcon 9 et Falcon 9 Heavy. Trop coûteuse Ariane 5 n’a
de fait, pour reprendre les mots d’Elon Musk, le CEO de Space Exploration
Technogies, lors d’un entretien à BBC News,
« aucune
chance » de rester compétitive. Reste que pour eux l’avenir appartient
désormais aux fusées réutilisables sur lesquelles SpaceX travaille. La solution
bâtarde trouvée incarne donc dans cette perspective le pire des mondes pour l’Europe,
« for
when ESA makes myopic choices like this, SpaceX deserves all the success it can
get ». Le Spiegel est plus mesuré : « In
the end, both countries got what they wanted », même si pour la DLR « Germany
consolidates its position in European space ». Pour le Monde.fr, c’est au contraire « l’Allemagne
[qui] se rallie au projet français de lancer Ariane 6 » alors que La Tribune.fr déplore que « la
France rend[e] les armes face à l’Allemagne ». Quant au ministère
de l’enseignement supérieur et de la recherche, il considère que « l’évolution
vers Ariane 6 a été actée » rappelant que le projet aujourd’hui
inscrit dans le marbre n’était il y a encore peu soutenu que par la France.
Le 19 novembre, la capsule Soyouz
TMA-05M est revenue sur Terre avec à son bord les astronautes Sunita
Williams (Etats-Unis), Akihiko Hoshide (Japon) et Youri Malenchenko (Russie) de
l’expédition 33. L’atterrissage a eu lieu à 7h56 du matin dans la steppe du
Kazakhstan. Pendant leur mission, les membres d’équipage ont effectué trois
sorties extravéhiculaires, ont accueilli des vaisseaux de transport russes
Progress, ont arrimé et désarrimé le cargo américain Dragon, et ont accueilli
le vaisseau habité Soyouz-TMA-06M.
Restés à bord de l’ISS, l’Américain Kevin Ford et les Russes
Oleg Novitskiy et Evgeny Tarelkin attendent quant à eux d’être rejoints par le
deuxième trio de l’expédition 34, le
Russe Roman Romanenko, le Canadien Chris Hadfield et l’Américain Tom Marshburn,
dont l’arrivée est prévue pour le 19 décembre. L’occasion de fêter Thanksgiving
la tête dans les étoiles.
La Chine a procédé le 19 novembre au lancement
à bord d’une fusée CZ-2C du satellite d’imagerie SAR HJ-1C. Le tir effectué
depuis la base de Tai Yuan a également mis en orbite trois autres charges
utiles, le satellite XY-1 (140 kg) et deux charges expérimentales FN 1 (160 kg)
et FN-1A (30 kg). HJ-1C, équipé d’une antenne SAR déployable de 6m de long, est
une première. La constellation d’observation de la terre Huan Jing (HJ,
« environnement » en mandarin) est composée de deux autres petits
satellites d’imagerie optique, HJ-1A et HJ-1B, en orbite basse depuis 2008.
Outre cette formation 2x1, la Chine a pour objectif de lancer d’ici 2020 une
constellation 4x4, quatre satellites optiques pour quatre satellites SAR.
Le lendemain, c’est un lanceur russe Proton-M qui plaçait en
orbite géostationnaire un satellite de communication BSS EchoStar 16, 6258 kg
tout de même. Ce tir, réalisé avec succès grâce à l’étage réallumable Briz-M,
rappelle que la Russie reste un concurrent sérieux face à Ariane dont l’avenir
est toujours aussi incertain. Malgré l’échec d’août dernier, la fusée Proton
maintient donc la cadence avec trois lancements en moins de deux mois, et
encore un ou deux d’ici la fin de l’année. Outre sa charge utile, EchoStar
emporte avec lui un disque en silicium contenant
100 images : « une sorte d’épitaphe qui tournoierait indéfiniment
à 36 000 kilomètres de la Terre et raconterait une histoire de l’humanité
lorsqu’il n’en restera plus aucune trace ».
Aujourd’hui même, enfin, à 12h06 heure locale, la Chine a lancé avec succès la constellation triple YG-16 depuis le centre de lancement de Jiuquan à l’aide d’une fusée CZ-4C. La famille de satellites d’observation Yaogan, débutée en 2006, cache de l’avis général des satellites de reconnaissance militaire (ISR) à imagerie à la fois optique, ELINT et SAR. Elle serait plus largement révélatrice de l’intérêt de la PLA pour le spatial et de son influence grandissante au sein de l’effort spatial chinois, de même que la preuve d’une transition de l’espace stratégique à l’espace tactique dans la perspective d’une stratégie anti-accès. Il s’agissait du 17e lancement chinois de l’année. Deux ou trois autres devraient encore avoir lieu d’ici début 2013 : un rythme impressionnant. Sur le spatial militaire chinoise, voir notamment cet article introductif rédigé pour Perspectives Internationales.
S’agissant de l’actualité cinéma, nous nous bornerons cette
semaine à évoquer la disparition du
Russe Boris Strougatski. Natif de Saint-Pétersbourg, astronome de formation,
il avait développé avec son frère Arkady un style littéraire unique très
idéaliste, inspiré de l’expérience communiste et qui donne une saveur si
particulière à la SF d’origine soviétique. Dernier membre encore vivant de la
fratrie qui aura offert à Andreï Tarkovski le scénario à l’origine du film de
science-fiction Stalker (1979), critique
du régime de Poutine, Boris est mort à 79 ans.
Et pas de nouvelles précisions sur les prochaines tentatives de lancement sud et nord coréennes ?
RépondreSupprimerJe n'ai rien sur la Corée du Nord. Le tir de la fusée sud-coréenne KSLV-1 est quant à lui prévu pour jeudi-vendredi. La prochaine note d'actualité en fera donc certainement part !
RépondreSupprimerMerci, espérons que le 3e et dernier essai sera le bon. La Corée du Sud n'a plus de moteurs de rechange.
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