lundi 31 décembre 2012

L’année 2012 selon De la Terre à la Lune

Au revoir 2012...
L’atterrissage extraordinaire du rover Curiosity développé par la NASA sur Mars et le compromis enfin trouvé entre Français et Allemands sur l’avenir de la filière européenne Ariane, le tout sur fond de crise budgétaire aux Etats-Unis et en Europe. Les échecs du lanceur russe Proton alors que celui-ci constitue l’un des deux grands piliers du marché spatial commercial. Les suites de l’aventure céleste chinoise incarnée cette année par l’amarrage de la capsule Shenzhou 9 – transportant  la première femme taïkonaute de l’histoire – au laboratoire spatial Tiangong 1. Le lancement surprise de la fusée nord-coréenne Unha-3 et le succès éclatant de Pyongyang parvenant à devancer sur le fil du rasoir son voisin du Sud dans la conquête de l’espace. La disparition de Neil Armstrong

… 2012 étant sur le point de s’achever, je vous propose de vivre une petite rétrospective en suivant, mois après mois, certains des événements marquants de l’année. Il ne s’agit pas d’être exhaustif ni de proposer un thème directeur : 2012 est trop riche pour cela, et contrairement à l’an passé (cf. le bilan 2011 Partie 1, Partie 2), le lecteur a désormais la possibilité de revenir sur la comptabilité et l’actualité spatiale hebdomadaire en cliquant sur les onglets présents sous la bannière. Je profite également de ce message pour évoquer à nouveau quelques billets d’analyse publiés dans le courant de l’année et toujours dignes de votre intérêt. Alors que 68 entrées ont été intégrées sur ce blog cette année, 2012 aura surtout été pour votre serviteur l’occasion d’intégrer cette communauté de passionnés qu’est l’Alliance Géostratégique : je salue ici mes camarades et collaborateurs d’écriture !

Bonne année à tous !

JANVIER

Le candidat à la nomination républicaine et ancien président de la chambre des représentants des Etats-Unis, Newt Gingrich, annonce aux électeurs de Floride qu’il veut que l’Amérique construise une base spatiale permanente sur la Lune d’ici 2020.
Tense: Former House Speaker Newt Gingrich (left) gestures beside former Massachusetts governor Mitt Romney (right) as they opened tonight's debate sparring over immigration policy
FEVRIER

Le petit lanceur européen Vega, développé par l’Italie, fait un début remarqué au Centre spatial guyanais, donnant à Arianespace une troisième fusée à même de conquérir de nouvelles parts de marché.

Le Printemps arabe provoque une nette augmentation dans le nombre des interférences intentionnelles en direction des satellites situés au-dessus du Moyen-Orient, incluant des brouillages très sophistiqués sans doute gouvernementaux. Par ailleurs, Eutelsat subit de manière répétée depuis 2009 des brouillages de ses communications au-dessus du Moyen-Orient et notamment de l’Iran.
AVRIL

L’ESA sollicite l’aide des réseaux de surveillance spatiale du monde entier afin de déterminer le statut de son satellite d’observation radar de la Terre qui a soudainement cessé de communiquer. Pléiades 1A est lui aussi mobilisé : le 15 avril, il prend ainsi à la volée le satellite de l’ESA alors que celui-ci passe à moins de 100 km de distance. Finalement, Envisat, long de 8 m, est devenu après 10 ans d’opérations l’un des plus dangereux débris situé en orbite basse.
Pleiades---Envisat---CNES---Serie-3-images---15-04-2012.jpg

Space Exploration Technologies Corp., plus connu sous le nom de SpaceX, s’est amarré avec succès à la station spatiale internationale. Une première pour un vaisseau commercial, et qui sera répétée en octobre.
JUIN

Le second exemplaire de l’avion spatial inhabité X-37B est retourné sur Terre après une mission record de 469 jours.
x37b plane
Liu Yang est devenue la première femme taïkonaute de l’histoire le 16 juin, date à laquelle fut lancée Shenzhou 9, la première mission habitée vers le laboratoire spatial Tiangong 1. Née en 1978 à Zhengzhou, dans la province du Henan, major dans l’armée de l’air, pilote chevronnée, Liu est désormais un symbole du programme spatial chinois. Il y a des coïncidences qui interpellent : si exactement 49 ans plus tôt, le 16 juin 1963, Valentina Terechkova devenait la première femme cosmonaute, en juillet dernier s’éteignait Sally Ride, la première femme américaine dans l’espace en 1983.
Liu Yang - Liu Yang, première chinoise dans l'espace - ParisMatch.com
JUILLET

DigitalGlobe et GeoEye, opérateurs américains de satellites d’observation de la Terre, ont négocié un accord de fusion créant un géant de l’imagerie spatiale. Sur un tout autre registre, DigitalGlobe participe par ailleurs au Satellite Sentinel Project, « the first sustained public effort to systematically monitor and report on potential hotspots and threats to human security in near real-time », en mettant à disposition de l’organisation les images prises au-dessus du Soudan.

AOUT

Neil Armstrong, le premier homme à avoir jamais marché sur la Lune, est mort à l’âge de 82 ans.
Sur la Lune - Neil Armstrong. Une étoile sur la lune - ParisMatch.com
Curiosity, le rover de la NASA, un bijou de technologie développé pour 2,5 milliards de dollars, a posé ses roues sur Mars.
Auto-portrait du robot Curiosity, sur Mars depuis le 6 août 2012.

SEPTEMBRE

La fusée indienne PSLV a lancé en orbite le satellite optique d’observation de la Terre, Spot 6. Exclusivement financé par Astrium, il devrait être suivi de Spot 7 début 2014. Spot 6 précède Pléiades 1B mis en orbite en décembre.
OCTOBRE

La fusée russe Proton, à bord de laquelle se trouve le satellite Intelsat IS-23, est de retour à peine deux mois après son échec retentissant de l’été lorsque des satellites de télécommunications russe et indonésien ont été égarés sur de mauvaises orbites. Ce succès ne peut cacher que 500 débris ont été créés après l’explosion de l’étage supérieur fautif, Breeze-M. La Russie n’est toutefois pas au bout de ses peines, comme l’a montré en décembre le semi-échec Yamal 402.
NOVEMBRE

A la veille de la ministérielle de l’Agence spatiale européenne, alors que de nombreux pays ont déclaré à la baisse leur budget spatial, la Grande-Bretagne annonce qu’elle augmentera son financement à l’ESA de 25%. Les 20 Etats-membres de l’ESA ont trouvé un compromis sur l’avenir de la filière Ariane en décidant, et d’améliorer Ariane 5, et d’investir dès 2013 sur la future Ariane 6. L’ESA a également choisi de rembourser la somme due à la NASA dans le cadre de la station spatiale en développant entre 2018 et 2020 le module de propulsion de la capsule américaine Orion.
DECEMBRE

La Corée du Nord devient le dixième pays à avoir lancé par ses propres moyens un satellite en orbite. Le lancement intervient après l’échec du printemps dernier durant lequel une fusée était tombée dans la Mer Jaune quelques minutes seulement après le décollage.
Le lanceur Unha 3 a mis en orbite un satellite nord-coréen le 12 décembre 2012. C'est le premier succès du genre pour la Corée du Nord.
… Bonjour 2013 et merci aux lecteurs de ce blog…

lundi 24 décembre 2012

De très joyeuses fêtes les pieds sur terre, les yeux vers les étoiles…


Pour célébrer ces fêtes de fin d’année, De la Terre à la Lune a convié le NORAD, expert plus que cinquantenaire dans le suivi du Père Noël, aidé depuis 1997 par le célèbre logiciel spatial AGI, et la NASA, excellente communicante cette année encore, aidée qui plus est par le Web 2.0, bref parfaite pour mettre l’ambiance à la maison...


... vous ne rêvez pas, il s’agit bien d’une version NASA (Gangnam) Style. Intitulée Nasa Johnson Style, la vidéo nous montre en 4 minutes les projets et les travaux en cours au Johnson Space Center, Houston, Texas. Ne soyez pas surpris si vous voyez passer quelques astronautes (dans l’ordre Tracy Caldwell Dyson, Michael Massimino et Clayton Anderson), nous sommes après tout au centre de la NASA affecté aux missions spatiales habitées, haut lieu d’entraînement et de gestion des missions après leur lancement. Les paroles sont traduites ici. La NASA a l’habitude de ce genre de vidéo très populaire voire carrément virale, plus de deux millions de visionnage dans ce cas précis. Cet été, une vidéo intitulée « We’re NASA and We Know It » avait ainsi parodié, sur une musique de LMFAO « Sexy and I Know It », le déroulement des événements de la nuit de l’arrivée du rover Curiosity sur Mars. Plus de deux millions de vues là aussi. 


Pour le passionné d’espace, rien ne saurait néanmoins égaler la mission Apollo 8 qui, lors de son voyage en orbite autour de la Lune, avait célébré Noël dans l’espace : l’occasion de prendre de belles photographies et de lire le Livre de la Genèse.


« ... And from the crew of Apollo 8, we close with good night, good luck, a Merry Christmas, and God bless all of you, all of you on the good Earth », « … Et de la part de tout l'équipage d’Apollo 8, nous terminons par, bonne nuit, bonne chance, un joyeux Noël, Dieu vous bénisse tous, vous sur la bonne vieille Terre »

Oh, et pour ceux qui s’inquiètent toujours malgré les moyens mis en place par le NORAD, qu’ils se rassurent...

« Roger, please be informed there is a Santa Claus », « Roger, soyez informés qu’il y a bien un Père Noël », ce à quoi le capcom répondit : « That’s affirmative, You are the best ones to know », « Affirmatif, vous êtes bien placés pour le savoir »


dimanche 23 décembre 2012

HANDs up, satellites !

Perhaps the most devastating threat could come from a low yield nuclear device, on the order of 50 kilotons, detonated a few hundred kilometers above the atmosphere. […] To execute this mission, all that is needed is a rocket and a simple nuclear device. Countries such as Iran, North Korea, Iraq and Pakistan possess missiles that could carry warheads to the necessary altitudes and either have, or are believed to be developing, nuclear weapons.


Satellite orbiting Earth inside the Magnetosphere
Pour les puissances dépendantes des systèmes spatiaux, le scénario décrit par la Commission Rumsfeld en 2001 a tout du cauchemar. Il suppose qu’un Etat voyou nucléarisé, comme la Corée du Nord, celle-là même qui la semaine passée a réussi pour la première fois à placer un satellite en orbite à l’aide de sa fusée Unha-3, puisse un jour se sentir à ce point menacé qu’il soit prêt à opter pour une attaque indirecte de type HAND – « High Altitude Nuclear Detonation », explosion  nucléaire à haute altitude. Prenons donc de la hauteur, disons l’orbite basse et au-delà, et étudions de plus près cette question…

Historiquement, l’arme nucléaire a été la première considérée lorsque l’objectif antisatellite (ASAT) est apparu peu de temps après le passage assourdissant (« bip bip ») de Spoutnik dans le ciel étoilé. Elle est alors en effet la seule alternative à même d’offrir avec certitude la destruction de sa cible. A la fin des années 1950, le Projet 505 (alias Mudflap) de l’US Army prévoyait ainsi l’utilisation du missile ABM Nike-Zeus, doté d’une bombe de 400 kilotonnes, contre des cibles spatiales. Jugé insuffisant, l’US Air Force lui préféra le Projet 437 : basé sur un missile Thor, certes plus lent au départ, celui-ci pouvait transporter une charge utile nucléaire beaucoup plus importante sur une plus grande distance. Cette capacité ASAT dotée d’ogive nucléaire a été déclarée opérationnelle à partir de 1964 après la série de tests de l’Opération Dominic conduits au-dessus de l’atoll Johnson dans le Pacifique. Une fois le retrait du programme Thor effectué en 1976, les Etats-Unis ont opté pour des mécanismes tueurs non-nucléaires à impact cinétique. L’URSS, et depuis 2007 la Chine, ont suivi la même voie. Et pour cause, les effets ASAT dévastateurs, durables et par-dessus tout totalement indiscriminés de bombes atomiques explosant à haute altitude n’ont pas manqué de poser nombre de questions sur les conséquences de leur utilisation.

Le test nucléaire du 9 juillet 1962, désigné sous le nom de code Starfish Prime, a été de ce point de vue une véritable révélation. Non seulement la détonation à 400 km d’altitude d’une bombe de 1,4 mégatonne a démontré que le total des radiations générées était suffisant pour provoquer une exposition excessive, c’est-à-dire supérieure aux radiations et rayonnements naturels cosmiques anticipés, de la part des satellites circulant en orbite avant dissipation. Mais elle a aussi montré l’existence d’effets moins immédiats, beaucoup plus importants que ce que les calculs avaient laissé supposer, incluant les interférences causées par l’impulsion électromagnétique (IEM, plus connue sous le nom EMP de l’anglais « electromagnetic pulse »). Si les pannes d’électricité provoquées à Hawaï, situé à 1 500 km du  point de détonation, sont généralement connues, de même que l’aurore artificielle apparue dans le ciel, on sait moins qu’environ un tiers des satellites présents en orbite basse ont été affectés. Au moins six – peut-être sept voire huit – d’entre eux auraient ainsi cessé de fonctionner dans les mois suivants le test, dont le premier satellite commercial de communication Telstar 1 lancé avec grand fracas à peine un an auparavant, le premier satellite britannique Ariel 1, les satellites militaires américains TRAAC et Transit 4B, Injun 1 et le satellite soviétique Cosmos 5.

De ce point de vue, il est relativement aisé de comprendre pourquoi les Américains – inquiets des conséquences qu’une course nucléaire dans l’espace aurait sur leurs intérêts commerciaux émergents en orbite par trop vulnérables face aux EMP – et les Soviétiques – tout aussi affolés face aux effets des radiations sur leur programme de vols habités dont la supériorité était indiscutable et le résultat politique très prometteur – se sont trouvés à la fin de l’année 1962 à la croisée des chemins. L’essor concomitant des « national technical means of verification », « moyens techniques nationaux » ou MTN, finira de faire pencher la balance du côté de l’auto-limitation ; les contours du régime de l’espace étaient nés.


Over the past few years, there has been increased focus on US space systems in low Earth orbits and their unique vulnerabilities, among which is their susceptibility to nuclear detonations at high altitudes—the same events that produce EMP.


L’utilisation, massive aux Etats-Unis, des ressources spatiales comme multiplicateur de force, « amplificateur d’efficacité » diront certains, a sans doute changé la donne. C’est d’autant plus le cas que – l’ASAT nucléaire n’étant pour dire les choses simplement qu’une tête nucléaire attachée à une fusée – toutes les puissances nucléaires du monde ont potentiellement une capacité ad hoc de déni d’accès à l’espace. 

Telle a partiellement été la leçon tirée lors du Winter War Game de 1997 de l’US Army et dont la RAND s’est faite l’écho, le scénario ayant donné un avant goût de ce qu’une guerre avec une puissance rivale n’ayant rien à perdre pouvait impliquer pour la puissance spatiale américaine. Ainsi, dans le monde imaginé de 2020, l’équipe BLUE (une force militaire américaine « transformée » ultra-dépendante de ses moyens spatiaux), placée face à face avec l’équipe RED (une armée russe modernisée mais non pas « transformée ») dans le cadre d’un conflit conventionnel européen quelconque, avait dû reculer devant la stratégie surprise mais efficace de son adversaire. Sans l’intervention des juges sceptiques quant à la vraisemblance d’une telle attaque, certes dévastatrice du point de vue des infrastructures spatiales, l’équipage RED aurait pu remporter aisément la victoire que lui avait fournie l’utilisation en début de combat d’armes ASAT. Il est exact que dans le monde réel, en dehors du wargame, les rivaux de l’Amérique auront à l’inverse de l’équipe RED tout naturellement à réfléchir aux conséquences de leurs actes une fois l’infrastructure spatiale américaine mise hors service, soit la crainte d’une montée aux extrêmes, d’une escalade conduisant inévitablement à la « destruction mutuelle assurée ». Cela paraît d’autant plus vrai dans notre cas que la nature indiscriminée de l’ASAT nucléaire a peu de chance de séduire une nation technologiquement avancée dépositaire d’un investissement personnel tout aussi important dans l’espace.

En réalité, et ce sont d’autres wargames – en particulier ceux confidentiels connus sous le nom de DEADSATS largement décrits dans un techno-thriller spatial datant de 2007 – qui nous en offrent l’illustration, l’ASAT nucléaire ne présente un intérêt certain que pour les puissances nucléaires ne participant pas à l’économie globale. En effet, renvoyer à la case « sous-développement » les pays désignés comme ennemis constitue le plus grand « égalisateur » jamais inventé. La supériorité spatiale occidentale, en premier lieu américaine, est ainsi menacée non pas tant par des nations technologiquement avancées à l’image du « peer competitor », mais davantage par des Etats dit « voyous » qui ont réussi à s’approprier des armes nucléaires, de même que les moyens d’en assurer la livraison. Un scénario sans doute plus vraisemblable que l’invasion aéroportée dont le récent remake de Red Dawn nous offre aujourd’hui le spectacle sur grand écran.

De tels Etats n’ont en effet pas de raison véritable d’intégrer la norme de la dissuasion. Non seulement un Etat voyou, pauvre, déjà affecté par des sanctions économiques, mettant à bas les constellations de satellite n’a pas ou plus les moyens de lancer ces mêmes armes sur le territoire national de ses adversaires. Mais la décision d’utiliser l’arme atomique pour une victoire tactique, visant des cibles automatisées, inhabitées, peut difficilement justifier un acte vengeur sous peine de sortir du cadre de la proportionnalité. Comment répondre à la destruction de milliards de dollars d’équipements et à la disparition de la capacité de mener une guerre technologique en dehors de ses frontières ? Comment répondre à ce type de guerre à « zéro mort » ? Tel est le dilemme des partisans de la dissuasion spatiale qui ont bien du mal à convaincre.

L’ASAT nucléaire pourrait être ainsi le seul exemple contemporain d’utilisation de l’arme atomique sans crainte de répercussion. Pour le prix de quelques fusées et de quelques ogives, un Etat voyou peut supprimer une grande partie des satellites d’observation de la Terre menacés par les effets directs mais aussi induits de l’EMP (exposition aux rayons ultraviolets). S’il est capable de produire des fusées plus puissantes et de suffisamment miniaturiser ses têtes (10 mégatonnes selon les estimations sont nécessaires), il peut aussi mettre en danger la constellation GPS. S’il parvient à rejoindre l’orbite géostationnaire, il peut enfin porter un coup fatal aux satellites de communications. Certes ces équipements, notamment ceux appartenant aux militaires, sont durcis. Reste que de nombreux services, y compris militaires, reposent sur le secteur commercial dont les satellites sont plus vulnérables à des événements EMP, perçus comme peu probables. La perte de ces systèmes est donc plus que coûteuse, elle est paralysante pour les nations avancées. C’est vrai au niveau militaire, ça l’est également au niveau économique. A l’inverse, l’espace reste avant tout un luxe pour l’Etat voyou. Sa survie lui importe davantage ; privée de la vue, de l’ouïe et de l’usage de la parole, la puissance spatiodépendante sera incapable de projeter ses forces, donc d’intervenir régionalement, permettant ainsi à l’Etat agresseur de bénéficier localement de sa victoire.
Cette présentation du « Pearl Harbor spatial » est naturellement imparfaite et partielle…
1) Rappelons tout d’abord qu’une attaque de type HAND, indiscriminée, a toute les chances de provoquer, sinon la destruction physique de la Station spatiale internationale, du moins son arrêt de fonctionnement et dès lors la mort quasi immédiate de ses occupants qui y vivent de manière permanente depuis 2000. L’assassinat de 3 ou 6 astronautes, « représentants de l’humanité », héros de plusieurs nations, ne manquera pas de provoquer une réaction vive de la communauté internationale, notamment de la part de l’Amérique, de ses alliés et de la Russie rassemblées dans une communion de douleur par un même désir de vengeance. La réponse serait sans doute conventionnelle, repoussée dans le temps du fait de la destruction des systèmes spatiaux dont dépendent toutes les armées du monde, mais elle n’en serait pas moins certaine.
2) A un tout autre niveau, plus technique, rappelons ensuite qu’un satellite ne constitue qu’une composante d’un système plus large, incluant notamment les stations au sol qui donnent les instructions, reçoivent et transmettent les communications qui utilisent les plateformes spatiales comme relais, et enfin servent de lieu de collecte pour les données recueillies par le satellite. Dans cette perspective, non seulement le segment sol est tout aussi menacé par les effets EMP, mais les signaux up & down eux-mêmes peuvent être perturbés par l’ionisation de l’atmosphère due à l’explosion nucléaire. Nous retrouvons ici le spectre de la menace EMP classique. Gageons que le lecteur saura satisfaire sa curiosité en jetant un œil sur les autres contributions de ce dossier sur AGS. 







jeudi 20 décembre 2012

L'actualité... en vidéos : X-37B, Corée du Nord, ISS, Turquie, Ariane, bref clôture de la saison 2012...

Dans la salle de contrôle située dans le comté de Cholsan, au nord de la capitale Pyongyang, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un assiste au lancement en direct.
La semaine dernière, un jour avant le tir nord-coréen qui a mis la presse en émoi, une fusée Atlas V lançait avec succès depuis le pas de tir de Cape Canaveral un drone spatial militaire en orbite. Le lancement du X-37B de l’Air Force avait été plusieurs fois reporté par United Launch Alliance (ULA), un incident moteur lors d’un précédent tir en octobre dernier d’une fusée Delta 4 ayant dû faire l’objet d’une enquête approfondie. Le dernier lancement d’ULA pour l’année 2012 a finalement eu le feu vert. C’est donc en dépit d’un temps capricieux que le X-37B s’est élancé pour une troisième mission, ce modèle précis ayant par ailleurs déjà eu l’occasion de voler lors de la première campagne de démonstration d’avril à décembre 2010. Il s’agit en effet d’une étape importante pour ce véhicule expérimental supposé être réutilisable : pour la première fois, un exemplaire du X-37B sera amené à revenir dans l’espace. Un deuxième lancement, OTV-2, avait eu lieu en mars 2011, cette mission ne s’étant achevée qu’en juin dernier après son atterrissage à Vandenberg Air Force Base et un record de 496 jours passés dans l’espace. Aucune date de retour n’a été indiquée ni par l’USAF ni par Boeing, l’atterrissage totalement automatique se fera probablement en Floride sur la piste autrefois réservée à la navette spatiale.

 Le X-37B est un avion spatial inhabité développé par l’US Air Force dans le cadre très confidentiel de l’US Air Force Rapid Capabilities Office (RCO). La communication de l’Air Force et de Boeing autour de l’appareil est pour le moins ambiguë. Jamais l’information n’a été à la fois aussi abondante – le X-37B est après tout le seul investissement que le RCO a officiellement reconnu, des kits d’information sont disponibles sur le site de l’USAF, de la NASA et de Boeing – et aussi limitée. De fait, personne ne sait véritablement ce que fait l’engin une fois dans l’espace. Tout au plus savons-nous de source officielle qu’il a été conçu pour deux choses : retourner sur Terre avec sa charge utile, et manœuvrer en orbite plus efficacement qu’un satellite. Il a beau ne transporter que 25-30% de sa masse en carburant, il peut se permettre de l’utiliser rapidement puisque sa mission dépasse à peine une année. Selon les commentateurs, survolant la Terre à une altitude située entre 300 et 400 km, l’appareil embarque à son bord plusieurs instruments, probablement d’observation, sans qu’il soit possible de les identifier. Avec un budget lancement supérieur à 600 million de dollars et donc un programme qui dépasse très largement le milliard, une chose est néanmoins certaine : l’USAF a certainement ses raisons pour poursuivre l’expérience.

Il est vrai, on peut relever une certaine extravagance tant l’existence de l’appareil étonne à la fois pour lui-même et conceptuellement sur le choix technologique plus large dans lequel il s’inscrit, l’avion spatial étant pour beaucoup une impasse. Reste que d’un point de vue dissuasif, le X-37B est parfait : tout le monde en parle, tout le monde se demande ce qu’il fait et tout le monde imagine les réponses. Or rien ne saurait être suffisamment coûteux pour la dissuasion. Dans cette perspective donc, le programme prend sens et se trouve justifié. Parallèlement, l’USAF collecte des données utiles et poursuit ses recherches. Bref voilà un programme qui correspond bien au zeitgest.



Retour sur la Corée du Nord après notre analyse à chaud de la semaine dernière. Le lancement de la fusée Uhna-3 étant désormais acté – son pilotage fin et précis, malgré les contraintes géographiques et physiques, a mis un terme aux doutes concernant la maturité technique du pays et sa capacité de manœuvrer, dans la mesure du nécessaire, le troisième étage sur la bonne inclinaison –, c’est au tour du satellite aujourd’hui en orbite héliosynchrone d’intéresser les commentateurs. De fait, moins de 24h après le tir, les Etats-Unis annonçaient que Kwangmyongsong 3-2 était « tumbling out of control ». L’image est trop puissante pour évoquer quoi que ce soit de réaliste de la part du public non averti. Il ne s’agit pas tant ici d’imaginer la marche aléatoire de l’homme imbibé d’alcool sortant de son estaminet préféré et tâchant de rentrer chez lui en suivant le trottoir rectiligne, un peu à droite, beaucoup à gauche, etc., et de la coller au satellite. Même tournant sur lui-même, l’engin restera (presque) indéfiniment sur son orbite. Davantage, l’idée est en réalité que l’appareil est incapable de se stabiliser, donc de pointer correctement son antenne en direction de la Terre, donc de communiquer avec ses propriétaires en Corée du Nord qui n’ont pas la chance d’avoir des stations dispersées sur toute la planète.

Le satellite nord-coréen est en effet, selon les détails que le régime a laissé filtrer, stabilisé trois axes, ce qui signifie qu’il est muni d’un système permettant de maintenir trois axes dans des directions fixes à l’inverse de la stabilisation d’orientation qui, elle, se définit par une mise en rotation autour d’un axe unique. Dans ces conditions – du moins à ce stade de nos connaissances, peut-être l’engin se stabilisera-t-il passivement dans les jours qui viennent selon des mécanismes prévus par ses ingénieurs – le satellite est inutilisable : ses transmissions coupées, les images recueillies par sa caméra basse résolution sont inexploitables. Pyongyang avait ainsi promis que le satellite entamerait bientôt depuis l’orbite des chants patriotiques en l’honneur de Kim Jon Il et Kim Il Sung, un peu comme le premier satellite chinois en 1970 transmettant L’Orient est rouge. Or le monde a beau ouvrir les oreilles, rien ne parvient.

Ci-dessous : la Corée du Sud récupérant les débris de la fusée Unha et affirmant qu’elle ne les rendra pas au voisin « ennemi » : reste à savoir quelles informations pourront être tirées. 



La Chine a procédé mardi dernier au lancement depuis le centre JSLC dans le désert de Gobi d’un satellite d’observation militaire turc, Göktürk 2. Muni d’une caméra de fabrication sud-coréenne avec une résolution de 2,5 m, le satellite de 450 kg a été placé par une fusée CZ-2D en orbite héliosynchrone à 700 km d’altitude. A l’annonce du lancement de cette plateforme entièrement construite en Turquie ont succédé les applaudissements du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, qui a parlé de moment historique : « In the past we did send satellites to space but Gokturk-2 has proven that we are now a country with a claim in this field. We are rising to position ourselves as one of the 25 countries which are capable of producing their own satellites ». La Turquie a passé commande pour un autre satellite d’observation Göktürk prévu pour fin 2014 : similaire aux satellites français Pléiades, il aura une résolution de 70 cm. Il s’agissait du 19e et dernier lancement chinois de l’année 2012. Au total, 28 plateformes chinoises et étrangères ont été lancées dans l’espace cette année.


Dernier lancement mondial de l’année 2012, Ariane 5 VA211 a lancé hier deux satellites de communications, Skynet 5D, construit par Astrium pour le ministère britannique de la défense (MOD), et MexSat 3 « Bicentenario » fabriqué par Orbital Sciences Corp. pour le compte du Mexique, d’une masse respective de 4 844 kg et de 2 934 kg, soit un total de 7 778 kg. Une performance somme toute modeste relativement à la capacité maximale d’Ariane 5 proche de 10 tonnes. Skynet 5D, la 38e charge utile militaire confiée à Ariane, ira compléter en orbite géostationnaire un système de communications de 3 satellites (Skynet 5A, 5B et 5C) dont l’objectif est de remplacer à terme les satellites Skynet 4. Il viendra renforcer et sécuriser Skynet 5B en couvrant le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie. Quant à MexSat 3, il constitue la composante spatiale du système de télécommunication satellite de nouvelle génération du gouvernement fédéral du Mexique. Cinquième satellite mexicain confié aux lanceurs Ariane, il possède 12 transpondeurs actifs en bande C et 12 transpondeurs actifs en bande Ku pour assurer la couverture du Mexique, de ses eaux territoriales et de sa zone d’intérêt économique. Le vol  211 est le 67e lancement Ariane 5. Il intervient après une série de 52 succès consécutifs courant sur 10 ans ; la fiabilité d’Ariane 5 est inégalée dans l’industrie. Avec dix vols en 2012 depuis le centre spatial guyanais, trois lanceurs différents, sept Ariane 5, deux Soyouz et un Vega, c’est par ailleurs une belle année qui s’achève pour Arianespace. Comme toujours, Arianespace met à la disposition du public un kit de lancement, à noter également le dossier beaucoup plus complet constitué par Astrium.



C’est avec l’ISS pour objectif qu’un vaisseau Soyouz a décollé de la base de Baïkonour mercredi 19 avec à son bord le dernier trio de l’expédition 34 composé du Russe Roman Romanenko, fils de Youri lui-même cosmonaute, de l’Américain Thomas Marshburn et du Canadien Chris Hadfield. L’amarrage à la station internationale est prévu pour vendredi. Commencera alors une mission de cinq mois pour les trois hommes d’équipage. Il faudra notamment prendre en main l’amarrage et le déchargement de quatre vaisseaux Progress, l’ATV-4 européen et la nouvelle capsule CRS-2 de SpaceX. Lorsque l’expédition 35 prendra la relève en mars prochain, Hadfield deviendra le premier commandant canadien de l’histoire de la station. A noter que la prochaine mission habitée Soyouz devrait intégrer le processus de rendez-vous rapide (seulement quatre orbites) dans ses plans de vol.



A propos de l’ISS, je recommande deux vidéos.
1) La première, une véritable visite guidée du laboratoire, a été enregistrée par l’astronaute américaine Sunita Williams, revenue sur Terre le 19 novembre dernier après quatre mois passés là-haut. De la coupole d’observation aux toilettes, en passant par l’emplacement réservé au coucher, c’est un aperçu inédit du quotidien spatial des astronautes qui nous est offert. L’adaptation des astronautes à l’environnement 0G, visible également à travers l’architecture même de la station, est bien illustrée : ainsi du mode de locomotion, l’utilisation des bras et des mains plutôt que des jambes et des pieds, l’absence rapidement domestiquée de repères haut-bas, la tête relevée, etc. 
2) La deuxième est un documentaire diffusé par ARTE samedi dernier et encore disponible en ligne gratuitement sur le site de la chaîne. Le film se propose de suivre deux astronautes de l’ESA, l’Allemand Alexander Gerst et le Néerlandais André Kuipers, à différents stades de leur carrière : respectivement, l’entraînement à Houston, à Moscou et à Cologne en vue d’une mission prévue pour 2014 et la mission effective à bord de la station spatiale bouleversée par les interrogations autour de la fiabilité des vaisseaux russes. Egalement disponible en 3D !
 

Au programme cinéma cette semaine, After Earth. Ce film, signé par M. Night Shyamalan,  présente à l’affiche un père et son fils, Will et Jaden Smith. Mille ans après un cataclysme ayant forcé l’humanité à quitter sa planète natale, un vaisseau endommagé s’écrase sur Terre devenue inhospitalière et hostile.



Profitant de la construction médiatique du lancement du « missile » nord-coréen, je ne peux m’empêcher de glisser un mot sur le remake du film Red Dawn de 1984 : la géopolitique est toujours hasardeuse et le scénario identique en tout point, mais alors que le premier – il est vrai tout aussi absurde, y compris pour l’époque reaganienne – racontait l’invasion des Etats-Unis par l’URSS et ses alliés cubains et nicaraguayens, le second n’a plus cette possibilité et se voit pour des raisons commerciales bien senties (le box office chinois a un prix) obligé de choisir la Corée du Nord. Celle-ci bénéficierait en effet – ère du temps oblige – d’armes cyber très sophistiquées à même de surmonter le rapport de force a priori défavorable. Oh !, et il y a les Spetsnaz russes pour aider… 



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mercredi 12 décembre 2012

La Corée du Nord en orbite !

North Korean scientists watch launch of Unha-3 rocket
On l’attendait, certains parlaient de la Corée du Sud, d’autres du Brésil, c’est finalement la Corée du Nord qui devient en cette année 2012 la dixième nation de l’histoire à lancer de manière autonome un satellite en orbite après l’URSS (1957), les Etats-Unis (1958), la France (1965), le Japon (1970), la Chine (1970), le Royaume-Uni (1971), l’Inde (1979), Israël (1988) et l’Iran (2009). La télévision nord-coréenne l’a annoncé très officiellement, le North American Aerospace Defense Command (NORAD) a un peu plus tard confirmé le succès : Kwangmyongsong-3, deuxième du nom, tourne actuellement autour de la Terre à 588 x 494, i = 97,4° sur l’équateur. Le satellite n’est certainement pas très sophistiqué, il devrait toutefois fournir à la Corée du Nord une première expérience en termes de communication et d’observation basse-résolution.



En procédant au tir de la fusée Unha-3 ce mercredi 12 décembre, Pyongyang a pris par surprise toutes les chancelleries du monde ; le régime ayant annoncé plus tôt que pour des raisons techniques le tir serait reporté jusqu’à fin décembre, d’après des rumeurs le lanceur était même en train d’être démonté pour vérification. Comme le note l’UCS, ce mouvement de dernière minute est intéressant. Il pose en effet la question de savoir s’il y a réellement eu un incident technique que les ingénieurs nord-coréens sont parvenus à régler rapidement, ou si le régime a intentionnellement orchestré une campagne de manipulation afin de tromper la surveillance des Etats-Unis, du Japon et de la Corée du Sud et de réduire au maximum la collecte d’informations durant le vol.

Malgré ce succès, la Corée du Nord n’est pas assurée sur la fiabilité de sa fusée. Construire des fusées reste un travail complexe, comme les échecs précédents l’ont montré. De ce point de vue, l’utilité militaire n’est pas certaine. S’ajoutent en outre les questions de la précision du missile, de la protection du corps de rentrée et de la miniaturisation des ogives (le satellite pèse 100 kg). 

N’en demeure pas moins que, politiquement, l’impact est immense. Et de fait, comme lors des fois précédentes, à plus forte raison maintenant, ce lancement – le quatrième après les tentatives ratées de mise en orbite de Kwangmyongsong-1 en août 1998 (échec du troisième étage), Kwangmyongsong-2 en avril 2009 (échec du troisième étage) et de Kwangmyongsong-3 en avril dernier (échec du premier étage et probablement du second) – n’a pas manqué de susciter les condamnations internationales. La Chine est restée quant à elle, comme à son habitude, très ambiguë. Le tir viole ainsi les résolutions 1718 et 1874 du Conseil de sécurité dont l’intention était de dissuader la Corée du Nord de procéder au lancement de missiles balistiques – des cousins technologiquement proches des fusées – alors que parallèlement l’on annonce la préparation de futurs essais nucléaires.

En parvenant à placer un engin en orbite avant le voisin du Sud, Pyongyang a marqué un grand coup qui objectivement mérite d’être salué. L’élément « prestige » n’est en effet pas à rejeter. Par ailleurs, quoi que l’on puisse dire sur la rhétorique nord-coréenne – l’usage pacifique de l’espace, le droit à l’exploration, etc. –, l’on rappellera que toutes les puissances spatiales ont usé de pareils stratagèmes pour avancer leurs intérêts dans l’espace, militaires notamment – militaires ne signifiant par forcément « armé » au sens actif, agressif du terme. Enfin, comme le relevait Christian Lardier dans l’entretien qu’il a bien voulu accorder à l’auteur de ce blog, ce qui est fusée pour l’expert spatial est souvent missile balistique pour le journaliste généraliste : un a priori que les hésitations quant au choix de l’intitulé des différents articles de la presse généraliste ont encore confirmé aujourd’hui, et qui doit de mon point de vue, ne serait-ce que sur la forme, et ce même s’il s’appuie sur une réalité stratégique certaine voire inquiétante, être discuté, affiné.



Pour un tour rapide de la question, on lira avec intérêt les propos de Valérie Niquet pour le Monde.fr, ainsi que, parmi beaucoup d’autres, les analyses à chaud de The diplomat ou Shadow Government. Etant donné l’inflation d’analyses sur le sujet, je reviendrai sans doute sur ce lancement dans la prochaine note d’actualité : pas sûr que le flot se sera calmé d’ici là.

dimanche 9 décembre 2012

L’actualité spatiale (choisie) de la semaine… en vidéos : Politique spatiale, « Black Marble », échec russe, vols balistiques publics

City Lights of Africa, Europe, and the Middle East
Plus que de coutume, cette semaine était l’occasion aux Etats-Unis de discuter politique et stratégies spatiales. Alors que l’attention du public était fixée sur la conférence californienne de l’AGU, l’intérêt pour l’événement ayant été excité par les spéculations récentes autour des découvertes martiennes du rover Curiosity, plusieurs experts discutaient à Washington de politique spatiale, de ce que la NASA allait (ou devrait) entreprendre ou non.
1) Lundi, ainsi, Secure World Foundation organisait une discussion sur « Space Policy Challenges Facing the Second Obama Administration ». Et en effet, ce ne sont pas les défis qui manquent. De la situation budgétaire après le 2010 Authorization Act alors que les relations entre l’Exécutif et le Congrès ne sont pas très bonnes : selon Marcia Smith de SpacePolicyOnline.com, « I don’t know if we’re looking at a train wreck that’s going to happen in the next year or two, or if we’re just going to end up stretching out programs ». De l’adaptation de la bureaucratie, NASA, Pentagone et USAF, à cette nouvelle donne et surtout de l’avenir de la réforme du contrôle des exportations (ITAR). De la façon avec laquelle les Etats-Unis perçoivent et interagissent avec la Chine. Ou encore du futur incertain du code de conduite malgré le soutien de l’administration Obama.
2) Mardi, c’était au tour de la Space Foundation de présenter au Congrès son dernier rapport intitulé « Pioneering : Sustaining U.S. Leadership in Space ». Le document de 70 pages, rédigé à partir d’entretiens de près de « 100 senior leaders », contient toute une série de recommandations pour la NASA et en premier lieu l’idée que l’agence spatiale devrait concentrer ses activités sur ce qui la définit le mieux : l’exploration du système solaire, et laisser le reste – le circumterrestre – aux autres organisations gouvernementales voire au secteur commercial. Tel est le sens du mot « pioneering », soit selon la Space Foundation, être le premier à entrer dans une nouvelle région et y développer les infrastructures nécessaires à l’arrivée des autres, quatre phases définissant alors le paradigme : accès (étendre les activités logistiques d’allées et venues), exploration (comprendre les risques et opportunités associés à la région), utilisation (utiliser la connaissance théorique acquise dans la phase précédente pour des objectifs pratiques autres), et transition (passer le relais à d’autres et recommencer le cycle ailleurs). Rien à voir avec la colonisation de l’espace selon les auteurs : l’objectif pionnier est avant tout d’étendre la sphère d’influence de l’humanité aux étoiles. De même que le fond des océans fait aujourd’hui partie de la sphère d’influence humaine, grâce à l’utilisation des robots, de même la NASA devrait-elle soutenir une présence ailleurs dans le système solaire.
3) Mercredi, le National Research Council (NRC) a à son tour remis son rapport sur « NASA’s Strategic Direction » au Congrès américain. Pour les membres du comité, l’objectif n’était pas de donner un avis sur ce que la NASA devrait faire, mais davantage d’évaluer la stratégie actuelle. Or cerner celle-ci est difficile : les documents existants, publiés en 2011, ne constituent pas une stratégie en soi aux dires du comité. Le problème est que « There is no national consensus on strategic goals and objectives for NASA ». La mission d’exploration d’un astéroïde en 2025 n’est ainsi pas bien comprise et ne fait pas consensus y compris au sein de la NASA. Les tentatives de justification de l’agence américaine en disent long : utiliser l’ISS, développer le SLS/Orion, soutenir le spatial commercial en LEO, investir dans les technologies de demain, financer des missions scientifiques comme le JWST, inspirer les futurs leaders, etc., bref pour Marcia Smith, « If it takes you that many phrases to explain it, then you do not have a crisp, clear strategic vision ». Cette réalité est néfaste pour le programme spatial américain dans son ensemble : selon le document, « Absent such a consensus, NASA cannot reasonably be expected to develop enduring strategic priorities for the purpose of resource allocation and planning ». En effet, « If the United States is to continue to maintain international leadership in space, it must have a steady, bold, scientifically justifiable space program in which other countries want to participate, and, moreover, it must behave as a reliable partner ».
Il est trop tôt pour dire quel impact ces différents documents auront dans la Beltway washingtonienne, de Capitol Hill à l’administration Obama reconduite pour un second mandat. Reste que cette inflation comitologique, qui aurait d’ailleurs pu aller plus loin si le Committee on Science, Space and Technology de la Chambre des représentants avait organisé, comme il en avait l’intention à l’origine, une séance ce jeudi autour du « Future of NASA : Perspectives on Strategic Vision for America’s Space Program », est bien le signe que les prochains mois pourraient amener de profonds changements dans le programme spatial américain. A moins que ce ne soit l’inverse : il est bien connu que lorsqu’il n’y a pas d’argent, il demeure l’apparence du débat, cela occupe et cela fait passer le temps.

A noter que pour commémorer le 50e anniversaire de la première mission interplanétaire, Mariner 2 en l’occurrence, le NASA History Program Office, avec l’aide du National Air and  Space Museum, du NASA Science Mission Directorate et du Jet Propulsion Laboratory, a accueilli un très intéressant symposium sur l’exploration du système solaire. Intégralement filmée, la conférence, disponible ici, vaut la peine d’être visionnée – les prestigieux intervenants qui y participent est déjà en soi un gage de qualité.



Il faut ajouter que ces documents viennent à point nommé alors que le spatial civil américain fait face à d’importantes rebuffades : du budget FY2013 vécu avec beaucoup de difficultés par la communauté scientifique ou du retrait de la participation américaine à la mission ExoMars de l’ESA. Malgré le succès de Curiosity et l’annonce que la NASA allait redoubler d’efforts – ici au sens littéral : en préparant le lancement pour 1,5 milliards de dollars d’un second rover identique au précédent pour 2020 –, il se pourrait qu’un changement de direction soit à l’œuvre. La découverte que le projet de station spatiale en L2 développé par la NASA (entre nous, n’en déplaise à Robert Zubrin, une magnifique opération qui justifierait à la fois le SLS/Orion et l’ISS, tout en résolvant le dilemme de l’exploration habitée du système solaire et notamment de Mars en mixant l’option 4 du retour à la Lune avec l’option 5 du « flexible path », pour reprendre la terminologie du comité Augustine) n’aurait pas reçu l’approbation de la Maison Blanche suscite également quelques interrogations. Alors que les Américains hésitent entre Mars, un astéroïde et L2, mais sans jamais parler de retour in situ sur la Lune, la Chine n’a pas manqué de mettre son grain de sel en indiquant par voie officielle que « les astronautes chinois pourraient cultiver des légumes sur la Lune ». Côté européen, on ne peut que s’étonner de la facilité avec laquelle l’ESA a oublié l’incident ExoMars pour se lancer avec enthousiasme dans une coopération avec la NASA sur le système Orion, une confiance qui laisse d’autant plus pantois quand on voit les Américains aujourd’hui annoncer sans vergogne ni honte le financement unilatéral d’un nouveau programme martien pour 2020. Pour les Etats-Unis, en tout cas, la question demeure : la Lune, Mars ou un astéroïde ? On appréciera le « timing » choisi par la société GoldenSpike, créée en 2010 et restée jusqu’à présent dans l’ombre.





Une fusée russo-ukrainienne Zenit 3SL s’est envolée dans la journée du 3 décembre avec à son bord le satellite de télécommunications Eutelsat 70B. Placé avec succès en orbite GEO, le satellite évoluera à la position orbitale 70,5° Est où il mettra à la disponibilité des clients d’Eutelsat une capacité en bande Ku. Il remplacera Eutelsat 70A, lancé en 2002, qui sera quant à lui redéployé vers une autre position orbitale. Le nouveau satellite, deux fois plus performant que son prédécesseur, couvrira de ses 48 transpondeurs l’Europe, l’Afrique, l’Asie centrale et l’Asie du Sud-est. Ces zones sont tout particulièrement susceptibles d’intéresser le Pentagone, un des clients réguliers de l’opérateur parisien dont les capacités propres dans la région sont en effet insuffisantes. Le lancement, effectué au milieu de l’Océan pacifique, est toujours aussi impressionnant. Créée en 1995, Sea Launch est en effet la seule société du monde à réaliser des lancements depuis une plateforme pétrolière flottante transformée, positionnée dans les eaux internationales à proximité de l’équateur, afin de maximiser la charge utile des fusées, tout en évitant le problème des retombées des débris. Un temps interrompues, les activités du consortium russo-américano-norvégien ont repris en 2010. Depuis la société gagne lentement mais sûrement en puissance au point d’incarner un concurrent sérieux pour Ariane 5 ECA. La mise en orbite d’Eutelsat 70B porte ainsi à trois le nombre de tirs spatiaux réussis opérés par la société Sea Launch cette année. La cadence de tir, relativement faible, devrait s’élever l’année prochaine maintenant que les partenaires russes et ukrainiens ont amélioré leurs relations et que la société a été restructurée.





Samedi, dans la nuit, International Launch Services (ILS) a lancé une fusée Proton-M. Le tir, effectué depuis le cosmodrome de Baïkonour, était censé déployer en GEO le satellite russe de communications Yamal-402 construit par Thales Alenia Space. Malheureusement pour l’opérateur Gazprom Space System, la troisième mission d’ILS après le retour à l’opérationnel du lanceur Proton suite à l’échec de la mission Telkom3/Express MD-2 – causé par l’étage réallumable Breeze M ici aussi en cause – le 7 août dernier, par ailleurs le huitième et dernier lancement de la campagne 2012 d’ILS, a échoué. D’une masse totale de 4463 kg, Yamal-402 devra donc gagner sa position orbitale par ses propres moyens. Selon un expert interrogé par RIA Novosti, à moins que le satellite ait été endommagé, le satellite pourra très certainement poursuivre sa mission certes au prix d’une durée de vie opérationnelle considérablement raccourcie : servir aux communications en Russie, Europe, Moyen-Orient et Afrique du Nord. Ce troisième échec en moins de 18 mois suscitera certainement de nombreux commentaires sur l’état de l’industrie spatiale russe et la difficulté pour fiabiliser son lanceur Proton. Quant au lancement de Satmex 8 à bord d’une Proton, prévu pour le 28 décembre 2012, il sera sans doute repoussé. Idem pour le tir Rockot-KM/Strela-3M utilisant le même étage supérieur fautif, le 15 janvier 2013. Pour un résumé, voir ici.



Dernier exploit du satellite de NASA/NOAA Suomi NPP, révélé à l’AGU : des images incroyables de la Terre vue de nuit. Ces données ne sont pas inédites en elles-mêmes, l’USAF possède par exemple des images similaires, à la différence que, outre être d’excellente qualité, elles ne sont pas classifiées mais ouvertes à tous. Cette « Black Marble », comme certains l’appellent déjà, est révélatrice de la fin programmée de l’holocène laissant la place à l’anthropocène : une nouvelle ère géologique marquée par l’influence accélérée – les derniers 8 000 ans et surtout les 2 derniers siècles – de l’homme sur le processus « naturel » géologique et biologique de notre planète. A cela s’ajoute bien entendu l’inégal accès à l’électricité, les zones développées, littorales pour la plupart, s’opposant aux régions toujours dépourvues et représentant 1,3 milliards d’individus.


Novespace, filiale du CNES qui gère l’Airbus A300 Zéro-G servant aux expériences en apesanteur lors de vols paraboliques, vient d’annoncer qu’elle ouvrait au public cette prestation. Pour au peu moins de 6 000€, il vous sera donc possible de monter à bord de l’Airbus, au décollage depuis l’aéroport de Bordeaux-Mérignac ou Paris-Le Bourget, pour découvrir cette sensation de flottement libre. Un service « Vomit Comet » unique en Europe, les vols paraboliques publics n’étant proposés jusqu’à maintenant qu’aux Etats-Unis – notamment par la Zero Gravity Corporation de Peter Diamondis – et en Russie. 3 vols commerciaux, organisés par la société Avico, sont prévus pour 2013. Tous les vols « Air Zero G » seront effectués en présence de Jean François Clervoy, astronaute de l’ESA et PDG de Novespace, qui partagera son expérience d’astronaute avec les passagers tout au long de la journée et interviendra en alternance auprès de chaque groupe  pendant le vol.



A la rubrique cinéma cette semaine, le retour d’une saga typiquement spatiale : Star Trek fait cette année une seconde apparition dans sa version modernisée, avec Into Darkness (J. J. Abrams). Sortie prévue en mai 2013. La bande-annonce, longue d’une minute, promet du spectacle ; et comme toute suite qui se respecte au moins depuis le Batman de Christopher Nolan,  le ton se veut sombre, les visages sont effrayés et la narration menaçante…

vendredi 7 décembre 2012

« Entretien avec un reporter de guerre »

Pour la fin de l’année, les Cafés Stratégiques d’AGS ont invité Patricia Allemonière, Grand Reporter, chef du service Etranger-Défense de TF1 et LCI.
Prochain Café Stratégique : rdv en 2013, le jeudi 10 janvier, avec là encore une excellente – et inédite ! – soirée en perspective.

dimanche 2 décembre 2012

L’actualité (choisie) de la semaine… en vidéos : Les deux Corées, Pléiades 1B

A passenger walks past a TV screen broadcasting the news that the launch of Korea Space Launch Vehicle-1 (KSLV-1), or Naro, was cancelled due to a problem in the upper second-stage rocket, at a railway station in Seoul November 29, 2012. South Korea cancelled the launch of its first space rocket on Thursday after a glitch in the propulsion system halted the countdown just minutes before the scheduled lift-off. It was the second delay in South Korea's third attempt to put a satellite into orbit, after October's scheduled launch was also called off due to a glitch in the Russian-built booster. No new launch schedule has been determined. REUTERS/Kim Hong-Ji
La fusée sud-coréenne KSLV-1 a de nouveau été victime d’un raté ce jeudi lors d’une seconde tentative de lancement depuis le pas de tir du Naro Space Center. Les ingénieurs n’auront pas laissé au lanceur le temps d’aller jusqu’au bout du compte à rebours, décelant à  moins de 17 minutes de la mise à feu plusieurs anomalies situées au niveau de l’étage supérieur construit par Séoul. Aucune nouvelle date n’a été fixée – et ce même si la fenêtre de tir est ouverte jusqu’au 5 décembre – alors que la Corée du Sud, très pressée d’entrer dans le club fermé des puissances spatiales asiatiques après deux précédents échecs en 2009 et 2010, subit au même moment la pression de son opinion publique excitée par les annonces de son turbulent voisin du Nord.

Et de fait le régime de Pyongyang souffle le chaud et le froid en annonçant, comme le prévoyaient depuis quelques semaines les commentateurs internationaux, qu’il procédera mi-décembre, précisément entre le 10 et le 22, à une nouvelle tentative de tir de sa fusée Unha-3 après celle ratée d’avril 2012 depuis la base de Sohae près de la ville de Cholsan au nord du pays. Comme elle l’avait fait en avril dernier, la Corée du Nord a communiqué à la ICAO et IMO ses intentions avec les données vols et zones d’amerrissage des étages usagés de la fusée à ses voisins de la région. Pyongyang a beau répéter que son programme spatial est pacifique, avec pour unique objectif la mise en orbite d’un satellite de météorologie, Washington et Séoul restent toutefois dubitatifs s’inquiétant des menées balistiques du pays et de leurs conséquences pour la péninsule alors que la Corée du Sud doit très prochainement élire un nouveau président.

Notons également que les Etats-Unis ont donné leur accord début octobre pour la construction par la Corée du Sud de missiles balistiques d’une portée de 800 km, contre les 300 autorisés jusqu’à présent depuis 2001 et la décision prise dans le cadre du Missile Technology Control Regime (MTCR) d’étendre la limite originelle fixée en 1972 des 180 km. Inutile de dire que Pyongyang a peu apprécié : la préparation d’un nouveau lancement moins d’un an après un échec – sans que les raisons de celui-ci aient pu être toutes identifiées – suscite forcément l’interrogation sur l’intention réelle : un signal politique plus que le signe d’un tir imminent ? A moins que la réalité puisse être expliquée autrement : cette quatrième tentative pourrait ainsi marquer le premier anniversaire de la mort de Kim Jong Il décédé le 17 décembre 2011, son fils Jim Jong Un l’ayant depuis remplacé à la tête du pays, de même que le centenaire de la naissance du père de Kim Jong, Kim Il Sun. Or selon la propagande nord-coréenne, 2012 est l’année durant laquelle le Nord deviendra une « grande nation, puissante et prospère ». Il ne reste que quelques jours aux ingénieurs du régime pour concilier théorie et réalité. Encore que cette fois-ci à l’inverse du tir d’avril la presse étrangère n’a pas été invitée, il ne sera donc pas difficile de cacher l’échec à la population…



En Asie toujours, une fusée Longue Marche 3B a placé ce mardi 27 novembre un satellite de communication chinois en orbite géostationnaire. Le satellite, construit à partir d’éléments « ITAR-free » par Thales à partir de la plate-forme Spacebus 4000, pèse 5054 kg et transporte en charge utile des transpondeurs en bande C et Ku. ChinaSat 12 emporte également avec lui le rêve de tout un pays : l’opérateur chinois a en effet accepté de louer une partie des capacités du satellite au Sri Lanka, d’où le co-label SupremeSat 1. La Chine étend ainsi un peu plus sa présence à l’étranger, la Great Wall Industry Corporation (GWIC) ayant déjà lancé plusieurs satellites pour le compte du Pakistan, du Nigeria, de la Bolivie et dernièrement du Venezuela.


La nouvelle est toute fraîche : initialement prévu vendredi soir, le quatrième tir de la fusée russe en Guyane, dit VS 04, un Soyouz ST-A équipé d'un étage supérieur « Frégat » réallumable, reporté de 24 heures à la suite d’une anomalie, a donc avec succès placé en orbite le 2e satellite du système Pléiades d’observation de la Terre développé par le CNES. Pléiades 1B a rejoint son jumeau Pléiades 1A à 695 km d’altitude, les deux satellites circulant de part et d’autre d’une orbite quasi-polaire héliosynchrone afin de rendre possible la revisite quotidienne d’un même point du globe : une capacité unique dans le domaine de la très haute résolution. Très agile, Pléiades pivote entièrement avec son instrument offrant des angles plus inclinés et notamment la possibilité de faire de la « stéréo massive » (plusieurs images d’une même scène, ce qui limite ainsi les zones masquées, en particulier dans les villes, et permet de produire des modèles 3D complets). Complémentaire du système français d’observation spatiale militaire Hélios 2 et des satellites Spot, le système Pléiades devrait être pleinement opérationnel au deuxième trimestre 2013. Les photos satellites, jusqu’à 450 par jour, à 70 cm de résolution sur une largeur d’image de 20 km, seront utilisées en priorité par les ministères français – d’où la présence du ministre – et espagnol de la Défense (48 images pour la France, 2 pour l’Espagne), ainsi que par les institutionnels civils et utilisateurs privés à travers la société Astrium GEO-Information Services (AGIS), distributeur exclusif des produits Pléiades sur le marché commercial civil.

Dans cette perspective, Pléiades 1B accentue un peu plus les contours de la compétition transatlantique dans le domaine commercial de la haute résolution optique qui oppose Astrium au nouveau conglomérat créé cet été de la fusion de DigitalGlobe (DG) et de GeoEye (GE). Dans le cadre de ce duopole de fait, AGIS compte capitaliser sur son expérience avec les satellites à haute et moyenne résolution, une constellation de 4 satellites en orbite espacés de 90° seulement pour maximiser la résolution temporelle, pour se positionner sur des marchés niches aux Etats-Unis – notamment avec la NGA (National Geospatial Intelligence Agency) et les suites du super-contrat EnhancedView à 7,3 milliards de dollars sur 10 ans – et surtout dans le monde alors que le marché estimé est déjà gros en 2012 de 1,8 milliards d’euros.


Deux astronautes russe et américain ont été retenus pour séjourner un an à bord de la Station spatiale internationale en 2015-2016. Roscosmos a désigné Mikhaïl Kornienko, alors que la NASA s’est fixée sur le nom de l’astronaute Scott Kelly : deux vétérans des missions habitées totalisant chacun entre 176 et 180 jours dans l’espace. Annoncée pour mars 2015, cette mission de 12 mois est inédite : habituellement, les séjours à bord de l’ISS ne dépassent pas six mois.  L’objectif est en effet de préparer les futurs voyages interplanétaires, notamment en étudiant les effets du milieu spatial (microgravité) sur la santé des astronautes (densité osseuse et masse musculaire, vision, centre nerveux, système cardio-vasculaire, etc.). Nos quelques connaissances dans ce domaine, bien qu’inquiétantes en elles-mêmes eu égard au futur de la colonisation de l’espace par l’homme, sont en effet insuffisantes. Depuis 1961, quatre hommes ont notamment fait l’expérience de missions de très longue durée : Valeri Poliakov (437 jours, 1994-1995), Sergueï Avdeïev (380 jours, 1998-1999), Vladimir Titov et Moussa Manarov (365 jours, 1987-1988).



Le système israélien Iron Dome (« Dôme de fer »), fierté de l’Etat hébreu, est devenu en l’espace de quelques jours un objet de fascination pour les internautes du monde entier, une véritable curiosité stratégique qui lève le voile sur toute la famille, du grand frère David’s Sling, parfois appelé Magic Wand, au plus grand frère encore, le système Arrow : « You can think of Iron Dome as the bantamweight, David’s Sling/Magic Wand as the middleweight and the Arrow as the heavyweight. And viewed together, you can see what Israel fears: a concerted barrage from Iran and its proxies that comprises everything from unguided Qassam rockets to Sejjil-3 ballistic missiles ». Parce qu’il ne sera pas dit que De la Terre à la Lune manquera une occasion de parler de « guerre des étoiles », je vous présente donc la bande-annonce cinéma de la semaine toujours d’actualité malgré les années :  j’ai nommé One Incoming, avec la participation active de Tom Clancy et de Charlton Heston et le soutien bienveillant du général Daniel O. Graham, un des hommes à l’origine de l’IDS :